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'Bacha les ordres du Grand Seigneur en leur faveur.

Le Bacha, qui étoit d'un caractère plus doux & plus humain, que ne le font ordinairement les Bachas, les reçut gracieusement, & ordonna l'exécution des Lettres dont ils étoient porteurs. Les Catholiques inftruits de l'arrivée des Miffionnaires, & du sujet qui les avoit fait venir à Erzeron, en témoignerent toute la joie poffible, & s'emprefferent à les loger, & à leur trouver un lieu commode pour y commencer les exercices de la Miffion.

Dieu avoit donné de grands talens au Pere Roche & au Pere Beauvoilier, pour remplir heureusement la fonction de Miffionnaire. Le Pere Roche avoit une douceur & une patience inaltérable, jointe à un air modefte,

affable, gracieux & gagnant. If poffédoit d'ailleurs la fcience des controverses, & s'en fervait toujours avantageufement contre le fchifme & l'héréfie. Le Pere Beauvoilier avoit un courage capable de tout entreprendre, & de tout fouffrir pour la gloire de Dieu: il difoit fouvent que le caractère propre des œuvres de Dieu étoit d'être contredites; ainfi, bien loin de fe laiffer rebuter des difficultés, elles ne fervoient qu'à l'animer. Son efprit alors étoit fertile en expédiens, dont il y en avoit toujours quelqu'un qui lui réuffiffoit.

Avec ces heureufes qualités les deux Miffionnaires, travailloient conjointement à l'établiffement de leur nouvelle Miffion. Ils gagnerent. d'abord l'Evêque

d'Erzeron. Ce Prélat étoit un bon vieillard qui cherchoit de bon

ne foi la vérité, & qui s'y rendoit fincérement. Quelques autres Evêques, Vertabiets & Prêtres fuivirent l'exemple de l'Evêque d'Erzeron. Son ancienneté dans Epifcopat, le rendoit recommandable dans tout le Pays : les peuples, qui fe laiffent aifément conduire par ceux qui font à leur tête, & qui les gouvernent, suivirent la voix de leur Pafteur, & celle des: Miffionnaires.

Les heureux commencemens de la Miffion d'Erzeron n'empêcherent pas le Pere Beauvoilier de penser toujours au vou qu'il avoit fait de confacrer fes: jours aux Miffions de la Chine, & pour lefquelles fes Supérieurs l'avoient deftiné. L'arrivée d'un nouveau Miffionnaire à Erzeron,, lui fit juger que cette Miffion étoit en état de fe paffer de lui.. Ainfi il ne fongea plus qu'à fe

préparer à partir pour chercher un chemin qui le conduisît à la Chine par la Tartarie.

Le Pere Roche vit avec douleur ces préparatifs; car il fentit la perte que faifoit fa Miffion naiffante. Il ne put cependant s'oppofer à la deftination & au vœu du Pere Beauvoilier. Ils prirent donc congé l'un de l'autre en s'embraffant mutuellement, le Pere Roche lui dit qu'ils ne fe reverroient que dans une meilleure vie ; & par un preffentiment de fa mort prochaine, il conjura le Pere Beauvoilier de demander à Dieu tous les jours pour lui une fainte mort, & de s'en fouvenir particulierement au faint Sacrifice de la Meffe.

En effet, quelque tems après le départ du Pere Beauvoilier, la pefte s'alluma dans tout le Pays. Erzeron en fut d'abord attaquée ;

le Pere Roche & fon Compagnon coururent auffi-tôt dans les maisons , pour y affifter ceux que le venin avoit déja faisis. Il en mourut un grand nombre entre leurs bras, après avoir entendu leur Confeffion, & avoir donné l'Extrême-Onction & le faint Viatique à ceux qui furent en état de le recevoir. Le Pere Roche, qui avoit fouvent demandé à Dieu la grace de mourir d'un martyre de charité, s'il ne pouvoit mourir en verfant fon fang, eut un preffentiment que cette grace lui étoit accordée. Il fit une Confeffion générale à fon Compagnon, dit la fainte Meffe; & continuant enfuite la vifite de fes malades, pour s'apprendre à bien mourir en préparant les autres à la mort, il fut arrêté tout-à-coup, & mourut peu de tems après du mal de ceux qui

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