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bois, & par quelques petits cantons de terre cultivée: ils s'étendoient jufqu'au bas du vallon terminé par une vafte prairie, arrofée de divers ruiffeaux que l'art y avoit conduit, aidé de la na

ture.

Sur le foir nous arrivâmes au Village de Salauroy. Plufieurs Grecs qui fçavoient mon arrivée, me vinrent trouver dans la maison où je devois paffer la nuit; ils me prierent avec inftance de leur faire une inftruction, dont ils étoient privés depuis longtems. Il me fallut paffer une partie de la nuit avec eux pour les fatis faire.

Nous marchâmes la journée fuivante pour gagner Gamich- Gumisz kané; comme nous y devions faire quelque féjour, on nous logea dans le Palais du Bacha. La Ville eft bâtie à mi-côte d'une

haute & ftérile montagne. Les maifons y font rangées en Am phithéatre, & à différens étages, regardant toutes le Nord. Lorf qu'à la fin du jour elles font éclairées par les lampes ou chandelles qu'on y allume, elles font une illumination toute des plus agréables. Le bas de la Ville eft baigné par les eaux d'un torrent qu'on voit fe précipiter du haut en bas de la montagne avec un bruit affreux.

Les Grecs ont dans Gamichkané fix cens maifons & fept Eglifes. Les Turcs y ont quatre cens maisons, & deux Mofquées. Nul peuple ne fe feroit jamais ávifé de venir habiter en un lieu auffi fauvage, & auffi mal fitué que celui dont nous parlons, fans l'efpérance de pouvoir s'enrichir des mines de différens métaux que cette haute montagne & les

voisines cachent dans leur fein; & c'eft auffi le feul, mais puiffant attrait qui y a attiré les Grecs & les Turcs, qui fouillent continuellement dans ces terres avec un travail.très-pénible dont d'autres profitent.

Je dirai ici ce que j'ai vû de ceš mines, & de la maniere dont on tire les métaux. La Miniere eft une pierre noirâtre & friable, laquelle réduite en pouffiere, & mêlée de litarge, fe met au fourneau; tout ce que cette pierre contient de particules d'or, d'argent & de plomb, tombe au fond du fourneau, & fe confond en une feule maffe. Pour faire la féparation des métaux, on remet cette maffe dans le fourneau au feu du réverbère : alors le plomb eft le premier qui fe détache, l'or & l'argent jettés enfuite dans l'eau froide, fe

féparent l'un de l'autre. On compte que chaque fourneau rend par femaine deux cens dragmes d'argent, & trente d'or. Outre ces riches métaux, les mines fourniffent une quantité immenfe de cuivre & de plomb. Les Grecs font les Entrepreneurs de ce travail. Ils en font les avances qui font grandes; car il faut qu'ils entretiennent tout au moins cinquante fourneaux pendant trois mois de l'année. Le Grand Seigneur a un Officier fur les lieux pour lever fes droits:

cet Officier en rend cent cinquante bourses au Grand Seigneur; mais il en retient presque autant pour lui. Des Marchands Arméniens transportent en Perfe une grande partie de ces mé

taux.

L'or & l'argent qui eft continuellement fous les yeux des

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habitans de Gamichkané entretient dans leur cœur une fi vive cupidité, que leur bouche qui parle de l'abondance du cœur, eft toujours ouverte pour en difcourir, ce qui leur ôte abfolument toute penfée de Religion & de falut. Je fis mon poffible mais inutilement, pour leur faire connoître les véritables richeffes qu'ils devoient rechercher, & qu'ils laiffoient malheureufement perdre. J'appris qu'ils avoient un Evêque je crus lui devoir rendre une vifite de pure civilité. Je le trouvai fi touché de la mort d'un neveu qu'il avoit enterré la veille, qu'il ne me fut pas poffible de lui parler de fon peuple. Je liai converfation avec un autre Evêque Arménien, un Caloyer, & deux Prêtres; mais après quelques difcours, je compris que pour

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