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le coupable. Elle fit les informations felon la coutume; mais l'affaffin étant Turc, & l'affaffiné étant Franc, comme ils parlent, il n'en fut plus queftion: car lorfque les Chrétiens vinrent en demander justice au Lieutenant de la Province, Représentez-moi le coupable, leur répondit-il, je le ferai punir; & l'affaire en demeura là.

La Miffion perdit fon Fondateur dans la perfonne du Pere Pothier. Il avoit fouvent demandé à Dieu la grace de verfer fon fang à fon service, & il femble que Dieu la lui eût accordée. Il avoit tâché de s'en rendre digne par une vie pure, laborieuse mortifiée, toujours appliquée à procurer la gloire de Dieu. Dieu de fon côté lui avoit fait des faveurs infignes. On fçait qu'il avoit fouvent prédit des chofes Tome III.

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importantes, & qui fe vérifierent; qu'il avoit été miraculeusement préfervé plus d'une fois de la mort dans des périls évidens. Mais la plus grande de toutes les graces qu'il reçut, ce fut celle de mourir à peu près comme il l'avoit toujours défiré & demandé à Dieu.

Les espérances de la Miffion de Chamaké étoient trop favorables pour l'abandonner. Si-tôt que l'on eut appris à Hifpaham la mort du Pere Pothier, on fit partir le Pere de la Maze, Miffionnaire Jéfuite, pour se rendre à Chamaké: le Pere de la Maze étoit alors âgé de foixante-cinq ans. Il en avoit paffé vingt dans cette Capitale de l'Empire, & dans les plus rudes fonctions de fon état. Si-tôt qu'il eut reçu l'or dre de partir, il fe mit en chemin par obéiffance, & fans avoir égard

à fon grand âge, & à quelques autres infirmités que fa vertu avoit toujours cachées.

Á fon arrivée à Chamaké, il alla chez le Sieur Boyhdanbegh, Résident de Pologne à la Cour de Perfe. Ce Seigneur & fon frere Perfidanbegh étoient les intimes amis du Pere Pothier. Après fa mort, ils prirent foin de fes meubles & de fa maison. Ils en mirent en poffeffion le Pere de la Maze, qui reprit les exercices de la Miffion que la mort du Pere Pothier avoit interrompus. Le travail étoit si grand, qu'il fallut lui donner un fecond. Le Pere Champion arriva de France très-à-propos pour lui en fervir. C'étoit alors un jeune homme plein de feu, d'un naturel charmant, qui n'avoit pas ceffé depuis fon entrée dans la Compagnie de demander l'emploi des Mif

fions. Il avoit même fait une étude particuliere de la Médecine pour fe rendre plus utile à l'Etat qu'il vouloit embraffer. Cette étude en effet lui fut fort avantageufe à Chamaké; car elle lui ouvroit, & au Pere de la Maze, les portes de toutes les maifons. Ils étoient par-tout bien reçus, & marchoient dans les rues avec une pleine li-. berté.

Pour mieux juger de l'utilité de la Miffion de Chamaké, & des fruits qu'on y cueille, on rapportera ici une lettre écrite de Chamaké à Paris, au Pere qui eft chargé du foin des Miffions du Levant.

Nous n'aurions jamais cru mon Révérend Pere, que la Miffion de Chamaké fût auffi néceffaire que nous le connoiffons par expérience. Cette Ville eft le rendez-vous de tous les commer

çans qui trafiquent en Mofcovie, en Suéde & en Hollande en forte qu'elle est toujours trèspeuplée d'Etrangers qui vont & qui viennent. C'est ce qui fait que notre feule Miffion dans cette Ville, nous tient lieu de plufieurs Miffions différentes ; car cette fucceffion d'étrangers que le commerce attire ici, nous donne continuellement de nouveaux difciples à inftruire, qui reportent à leur Nation les inf tructions qu'ils ont reçues de' nous. Je leur dis tous les jours la fainte Meffe. Nous avons trouvé le moyen de les y faire affifter, & de leur faire entendre après la Meffe l'inftruction que nous leur faifons en Turc ou en Arménien, qui font les langues dominantes. La coutume eft établie qu'en arrivant en cette Ville, & avant que d'en fortir, les

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