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gne eft dans l'ancienne Géogra phie le Mont Gordien, Mons Gor dicus Son fommet eft divifé en deux pointes, toujours couvertes de neige, & prefque toujours environnées de nuées & de brouillards, qui en dérobent la vûe. Au bas de la montagne, ce font des fables mouvans, entrecoupés de quelques pelouses maigres, où de pauvres Bergers conduisent des troupeaux qui fe fentent de la mauvaise pâture; plus haut, ce font d'affreux rochers noirs, & entaffés les uns fur les autres, où néanmoins des Tigres & des Corneilles trouvent à fe nourrir. On n'y peut parvenir qu'avec d'extrê mes difficultés, à caufe de la roideur de la montagne, de l'abondance des fables, & du manque d'eau.

- Le Mont Ararat eft à dix ou douze lieues d'Erivan, tirant en

tre le Midi & l'Orient.

CHAPITRE III.

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Etat préfent des Arméniens.

E ne m'arrêterai pas à décrire les qualités qu'on attribue communément aux Arméniens.

On loue en eux un fens droit, leur prudence, leur habileté dans le Commerce leur application continuelle & infatigable au travail qu'ils aiment d'inclination un fond de bonté naturelle, qui les lie aifément avec les Etrangers, qui exclut d'entr'eux toute querelle, pourvû que l'intérêt ne s'en mêle pas. Les défauts qu'on leur reproche, font ceux de prefque toutes les Nations, d'aimer le gain & le vin, & par-deffus toutes chofes leur intérêt; mais il faut

dire à leur loüange, qu'il n'eft peut-être pas au monde un Peuple plus fufceptible des fentimens de Religion, & plus conftant à les fuivre: ils aiment les difcours & les Livres de piété ; ils n'épar gnent rien pour la décoration de leurs Eglifes, qui font les mieux ornées de tout l'Orient.

Le Chriftianifme qu'ils profef fent, a pour eux de grandes ri gueurs, il les oblige à des jeûnes longs & auftères, qu'ils obfervent avec une régularité fi fcrupuleufe, qu'ils ne s'en difpenfent, ni pour caufe des longs & pénibles voyages où leur commerce les engage, ni même pour caufe de maladie; leur fidélité à s'acquitter de la priere, n'eft pas moins édifiante.

On fçait que Cha-Abas I. furnommé le Grand, défefpérant de garder l'Arménie contre les

Turcs, & ne voulant leur laiffer qu'un Pays défert, enleva plus de vingt-deux mille familles Arméniennes, & les divifa en plufieurs Colonies, qu'il difperfa dans les diverfes Provinces de fes Etats. Mais la plus grande partie de ces Colonies ayant été confondues avec les Mahométans dans les régions éloignées, ont eû le malheur avec le tems d'oublier leur origine, & la Religion de leurs Peres.

Il n'en a pas été ainfi de la Colonie que Cha-Abas établit à une、 lieue, & comme dans le Fauxbourg d'Ifpaham. Ce Prince, qui avoit de grandes vûes, ayant reconnu que fes Etats pouvoient fournir à un riche Commerce; mais que les Perfans portés naturellement à l'oifiveté & à la profufion, étoient incapables de l'entreprendre & de l'entretenir, réfolut

folut de fe fervir des Arméniens peuple d'un naturel tout contraire, pour mettre à profit dans fes Etats les richeffes qu'il y trouvoit. Il comprit d'ailleurs que les Arméniens étant Chrétiens feroient mieux venus dans l'Europe,' que toute autre Nation, qui ne l'étoit pas. Il réuffit dans fes deffeins; les Arméniens prirent goût au commerce, & depuis ce temslà, ils ont porté par tout le monde le commerce de la Perfe.

Un des premiers fruits qu'ils en retirerent, fut de fe bâtir une Ville près d'Ifpaham, Capitale de la Perfe; ils la nommerent Sulfa ou Julfa, du nom d'une Ville de leur premiere patrie, & cette Ville eft aujourd'hui confidérable; elle a fon Kalanther de leur Nation; cet Officier eft comme qui diroit parmi nous, un Maire ou un Juge de la Police.

Tome III.

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