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Le rituel contient un grand nombre d'autres bénédictions; mais nous avons dù nous en tenir aux plus importantes, à celles qui ont vraiment une place officielle dans la liturgie et dont les origines sont les plus reculées.

Ce chapitre qui, comme d'autres, ne pouvait être qu'un résumé, prouvera, si nous ne nous abusons, que la plupart de ces rites si souvent attaqués par les protestants et par les rationalistes comme des inventions des siècles barbares et superstitieux du moyen âge, remontent presque tous bien au delà.

Bien mieux, dans l'ancien et dans le nouveau Testament les éléments sont déjà employés avec la même signification qu'ils auront dans la liturgie, et cet usage est si conforme à la nature et aux lois mêmes de l'esprit humain qu'on le retrouve au fond de la plupart des cultes de l'antiquité, plus ou moins perverti par des interprétations grossières. Actuellement et grâce à ces documents tout récemment découverts, dont nous avons parlé, on en peut faire remonter la tradition dans la liturgie chrétienne au moins jusqu'au Ive et même jusqu'au Ie siècle.

Au point de vue philosophique et théologique, au point de vue de la légitimité du culte lui-même, il est facile aussi de justifier ces pratiques. Le domaine de Dieu s'étend sur tous les êtres; tous s'efforcent à leur manière de le louer; l'homme qui est, par son intelligence et par sa liberté, le roi de la création, le chef de toutes les créatures, sur lesquelles il a droit d'exercer son empire, l'homme en est aussi le prêtre. Il est vraiment digne et juste qu'il les fasse concourir au culte de Dieu. Il semble qu'elles poussent ce gémissement dont parle saint Paul pour être délivrées

PRIÈRE ANTIQUE.

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de la servitude, et réservées à un plus noble usage (1). L'homme n'est pas un pur esprit ; la créature devient pour lui un symbole qui lui permet de s'élever aux choses invisibles. Du moment où l'Église n'est pas la réunion de quelques privilégiés de l'intelligence ou de la haute culture, il faut qu'elle parle le langage compris de la foule, qu'elle s'adresse à l'esprit et au cœur de ces pauvres, de ces ignorants qui n'ont guère appris à lire et à philosopher que dans le livre de la nature, et à qui le Seigneur lui-même ne parlait qu'en paraboles. L'Église n'a fait que continuer son enseignement, et de même que l'Évangile accessible aux plus humbles, contient des trésors pour les esprits éminents, ainsi cet autre évangile qui est la Liturgie catholique, se révèle aux plus humbles et fournit des sujets de méditation aux âmes les plus spirituelles.

Lorsque l'encens s'élève vers la voûte de nos églises, qui ne comprendrait et n'admirerait les paroles qui accompagnent ce rite ! « Seigneur, que ma prière soit dirigée vers toi, comme l'encens que nous brûlons en ta présence! » Lorsque l'Église vous met sur le front des cendres avec ces paroles de la Genèse : « O homme, souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière, »ne sentez-vous pas mieux, sous ce symbole éloquent, la vanité de votre propre chair et la fragilité de la vie humaine? Quand le pontife oint le front du néophyte de cette huile dont les athlètes se frottaient les membres pour les assouplir et les fortifier, ce symbole ne lui révélera-t-il pas la nécessité de la lutte contre les adversaires de sa foi, ou contre cet

(1) Scimus enim quod omnis creatura ingemiscit et parturit usque adhuc, quia et ipsa creatura liberabitur a servitute corruptionis. Rom. viii, 23.

ennemi qu'il porte en lui-même et qui l'entraîne au mal? Oui vraiment, nous pouvons le redire : « Les choses invisibles de Dieu nous sont révélées par celles qu'il a revêtues d'une forme visible. »

CHAPITRE XXV

PRIÈRES AVANT ET APRÈS LES RÉPAS

« Soit que vous mangiez, seit que vous buviez, quelque chose que vous fassiez, faites tout à la gloire de Dieu. »

(I Cor. x, 31.)

Ce précepte a été rempli à la lettre par les disciples du Christ, qui ont tenu à consacrer toutes leurs actions à la gloire de Dieu et au nom du Seigneur JésusChrist.« Avant de prendre de la nourriture, dit Clément d'Alexandrie, il convient que nous louions le créateur de toute chose, et il convient aussi que nous le chantions, quand nous prenons comme nourriture les choses qu'il a créées (1). » Le texte de Tertullien auquel nous avons fait allusion ailleurs, dit que les chrétiens aiment à faire le signe de la croix au commencement de toutes leurs actions, et spécialement en se mettant à table (2). « Nos repas, dit-il dans un autre écrit, n'ont rien qui soit vil ou immodeste. On ne s'étend sur son lit qu'après avoir commencé par prier Dieu (on sait qu'à cette époque on mangeait étendu

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sur une sorte de lit); nous ne mangeons que ce qu'il faut pour apaiser notre faim, nous ne buvons qu'autant qu'il suffit à des hommes modestes. On mange sans oublier que l'on doit adorer Dieu pendant la nuit. On s'entretient sans oublier que Dieu écoute. Après qu'on s'est lavé les mains et que sont allumés les flambeaux, on engage chacun à chanter, au milieu de tous, les louanges du Seigneur, en recourant aux saintes Écritures ou de son propre fonds. Par là on voit comment il a bu. La prière termine également le repas (1). » Sans doute Tertullien parle ici de l'agape qui était un festin religieux, presque liturgique ; mais les mêmes règles s'appliquaient à tous les autres. Le chrétien priait avant le repas pour éviter tous les excès qui se commettaient si fréquemment à cette époque. chez les païens, et aussi pour remercier Dieu qui, dans sa libéralité, nous donne « le pain de chaque jour ».

C'est probablement aussi durant les agapes que l'on portait aux convives des santés avec une pieuse acclamation, d'un caractère presque liturgique. L'usage de ces libations nous est attesté par des inscriptions, comme les suivantes, que l'on lit dans les plus anciens verres chrétiens : « Bois dans le Christ! » << Bois dans la paix de Dieu!» « Bois pieusement! » <«< Fais une libation, bois et vis! » « Le plus digne des amis, bois et vis avec tous les tiens et porte à ton tour une santé (2). »

Une des plus anciennes formules de prière pour

(1) Apol., 31.

(2) Garrucci a réuni une riche collection de ces inscriptions dans ses Vetri ornati nei cimiteri dei cristiani primitivi, Roma, 1858.

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