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vans, & qui reftoit cachée & prefque ignorée dans les bibliotheques La Tragedie d'Electre du même auteur aura encore obligation de la lumiere, où elle va paroître, au grand éclat qu'a eu Medée.

Vous devinez fans doute Monfieur, où ce début va me conduire. Partisan déclaré de la déclamation, je ne puis pas laiffer échaper un moment fi favorable de vous en éntretenir & de juftifier mon fentiment fi oppofé fur cette matiere, dites-vous, à ce que pense le refte des hommes.

En vain M. de Longepierre avoit fait tous fes efforts, comme Ariftote le confeille, pour donner une Tragédie fi parfaite, qu'elle fût capable de plaire fans le fecours des Co médiens & hors de la répré

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Medie

fentation; en vain avec le fecours d'une expreffion travaillée, il espéroit animer & foûtenir fon ouvrage,, lors que n'étant plus dans la bouche des Acteurs qui lui donneroient Pref. do en quelque maniere la vie, il feroit comme mort fur le papier, l'ouvrage étoit mort effectivement: quelques défauts, fur tout celui de l'expreffion dure & forcée en plufieurs endroits, avoient offulqué les beautés dont brille cette piece. Medée, quoi que faite d'après les plus grands modeles, languiffoit auprès d'Amalafonte & de Virginie, quand une Actrice a fçu la faire revivre & la faire admirer du public. Cet exemple fert à confirmer mon opinion fur la déclamation.

Vous voulez bien, Monfieur,

que je m'en explique dans cette Lettre avec plus d'ordre & avec plus d'étenduë, que je ne le fis lors que nous en parlâmes.. Vous regardez tous les acteurs, quels qu'ils foient, comme des échos, qui ne diroient rien, fi d'autres n'avoient parlé avant eux : il est vrai, dites-vous que quelques-uns rendent les fons plus diftinctement & avec plus de grace que d'autres: un talent fiborné après tout,doitil être d'un grand prix & peutil entrer en comparaifon avec le merite & le genie du Poëte? Vous remarquâtes qu'Aristote & Horace, les premiers maî tres du dramatique, avoient fait fi peu de cas de la déclamation, que ni l'un ni l'autre ne l'a point comptée dans la diftribution des parties du poëme, quoi qu'Ariftote y ait pla

cé la décoration du théatre, qui eft fans contredit moins confiderable que la déclama

tion.

Je penfe au contraire, qu'à peu de chofe près, l'art de la déclamation eft auffi beau auffi grand, auffi nécessaire que celui de la poëfie: Bien plus, je crois, qu'en examinant & en lifantune Tragédie, quel que achevée qu'elle foit, il eft impoffible d'y apercevoir & d'y découvrir dans toute leur étendue certaines beautés qui n'éclatent & qui ne fe dévelopent que fur le théatre. Je fçais que je heurte le précepte d'Ariftote, le fentiment de Corneille,& celui fans doute de bien d'au tres; mais fi l'experience eft contraire au fentiment de ces grands hommes, & s'il eft vrai que les fublimes beautés de

quelques-unes des Tragédies du Grand Corneille lui-même ne paroiffent jamais dans une fi belle pompe & dans une fi grande majefté, que quand elles fontjouées par d'habiles acteurs: cette experience prête un grand appui à mon fyftême. Pour revenir à ce qui fait le fujet de cette Lettre, & pour y établir un objet certain, je vous prie, Monfieur, de vous rapeller la jufte distinction que je mets entre des Comédiens fans art & fans naturel, qui font comme vous les définif fez, de fimples échos, en qui l'on ne reconnoît de merite, que celui de pouvoir appren dre & repeter leur rôle, bien differens d'avec ces acteurs illuftres, qui apprennent par cœur à la verité, mais qui fçavent charmer par la beauté de

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