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le bon usage Suédois, de prendre d'abord un petit verre d'eau-de-vie avant de nous mettre à table. Mais on ne nous donna que de l'eau-devie d'orge de Danemarck avec du biscuit, du fromage & du beurre aigre. Les mets qu'on nous fervit à table, confiftèrent en poiffon fec coupé en petits morceaux, en un bon gigot de mouton, de la foupe au fyra, un plat de truite faumonnée & de la pâtifferie. Nous mangeâmes de bon appétit de tous les mets, l'exception du beurre aigre & du poiffon fec auxquels nous ne touchâmes guère; mais en revanche, nous mangeâmes beaucoup plus de pain qu'il n'eft ordinaire aux Islandois d'en manger.

Pour un dîner auffi fomptueux, il falloit du deffert. On en fervit; c'étoit de la viande de baleine & de veau marin ( haf kalf). Cette viande eft ou cuite & falée, ou féchée à l'air. Elle reffemble beaucoup au lard rance; & le goût en eft fi déteftable, qu'un petit morceau que nous en prîmes, nous fit lever plus tôt de table que nous ne penfions le faire. Je n'ofe pas m'arrêter plus long-temps fur la cuisine Iflandoife; vous en avez fans doute affez, & vous defirez également la fin de cette épître.

LETTRE .

LETTRE

XVII.*

A M. LE CHEVALIER BECK, Sur les Maladies qui règnent en Iflande.

Vous defirez, Monfieur, que je vous donne

des détails fur les maladies qui règnent en Iflande. Je ne demande pas mieux affurément; mais, pour m'acquitter à votre fatisfaction d'une entreprise qui demande tant d'exactitude & de connoiffances, il faudroit que je fuffe moi-même Médecin.

Ayant eu le bonheur de ne point connoître les maladies par ma propre expérience, je fuis, je l'avoue, d'autant plus ignorant dans cette partie, que je ne me fuis jamais appliqué à l'étude de la Médecine. J'efpère que vous ne me jugerez point rigoureufement fur les détails dans lesquels j'entrerai.

L'air pur & fain qu'on refpire en Iflande, devroit contribuer beaucoup à en fortifier les

(*) Cette Lettre eft la onzième dans l'original, & elle eft datée de Stockholm, le 1er octobre 1776.

S

habitans. Il est à croire que c'eft la nourriture & la manière de vivre des Iflandois, qui les empêchent de devenir auffi forts qu'on pourroit l'attendre de la falubrité du climat. Les enfans nouveau-nés, ne font nourris du lait de leur mère que pendant les trois premiers jours tout au plus. Ces trois jours révolus, on les met au lait de vache; & dans les mauvaises années on mêle ce lait avec de l'eau & de la farine. On fuit le même ufage en quelques parties de la Finlande. Apparemment que cette nourriture des enfans, qui leur eft falutaire dans d'autres pays, l'eft moins en Islande.

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Les Iflandois vont très rarement au-delà de 50 à 60 ans ; & ils éprouvent même dans la force de leur âge beaucoup de maladies (a).

Les femmes dans ce pays, comme presque par-tout, vivent plus long-temps que les hommes; mais on remarque que ce font celles qui ont eu beaucoup d'enfans, qui parviennent à un plus grand âge (b). On en voit beaucoup

(a) Il y en a qui parviennent à l'âge de quatrevingts ans & au-delà. J'ai connu un nommé M. Bjarne Helgefen, curé de Skard, vieillard très-respectable, qui n'avoit pas moins de quatre-vingts ans.

(b) Voyage d'Egg, Ol.

de fort âgées, & ce font celles qui ont été le plus fécondes. Il n'eft pas rare en Islande de trouver des femmes qui ont eu jufqu'à douze & quinze enfans (a).

Le fcorbut (skyrbjugur) (b) eft de toutes les maladies connues en Iflande, la plus commune. Cette maladie fe manifefte dans les uns comme chez nous, & dans d'autres par des fymptômes effrayans; c'eft alors qu'on lui donne le nom de liktraad, (la lèpre) qui cependant ne peut pas fe comparer avec la cruelle maladie autrefois fi commune dans le Levant. En Islande elle commence par des gonflemens aux pieds & à la tête quelquefois toutes les parties du corps en font attaquées : la peau devient luifante, & prend une couleur plombée les cheveux tombent: la vue, l'odorat, le goût & le tact diminuent; & fouvent on les perd tout

(a) Bjarne Haldorfon rapporte, dans fes Annales manufcrites, que la femme du Gudmund Jonfon, à Hualnas, au nord de l'Iflande, a eu de vingt-une couches, vingt-quatre enfans.

(b) Cette maladie n'étoit pas connue avant 1289. elle s'eft introduite fur la flotte Norwégienne, dans la guerre que le roi Eric fit au roi de Danemarck. Les Sagas Iflandoifes n'en font point mention avant cette époque.

à-fait les bras, les pieds & le vifage se couvrent de boutons la respiration devient difficile & l'haleine puante: des douleurs exceffives fe font fentir dans tous les articles : une éruption qui couvre le corps, fe convertit en plaies qui

conduifent enfin le malade au tombeau.

Les Iflandois font ufage de tifanes anti-fcorbutiques, de bains fecs, ainfi que de bains humides dans lefquels ils font cuire du bois de genièvre. Ils emploient principalement du mercure préparé, remède qui, pris d'abord, arrête la maladie dans fon principe. Cette maladie n'est pas contagieufe, mais elle paffe des pères aux enfans. Il eft remarquable que deux générations peuvent en être exemptes, & qu'elle fe manifefte de nouveau dans la troifième. Elle ne fait pas mourir tout de fuite; il y en a qui en font tourmentés pendant 20 à 30 ans.

Les hommes qui font la pêche, font plus fréquemment attaqués de la goutte (torrvark). Elle eft caufée par l'humidité & le froid auxquels ils s'expofent en maniant les filets & d'autres uftenfiles de pêche dans l'hiver.

L'éryfipèle (aama) eft fort commun parmi les Iflandois. Ils y appliquent avec fuccès des vers de terre, (anamadkar) ( lumbricus terreftris). Il faut que le ver foit vivant; on le

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