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lant Capitaine; mais de qui, la forturie n'a pas fecondé toûjours la valeur.

MINOS. Voilà parlé fortement, & non en Barbare. Que répons-tu à cela Alexandre ?

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ALEXANDR E. Que ma renommée fuffiroit pour me donner l'avantage, fi je ne voulois l'emporter par la force de la raifon, auffi-bien que par les armes & triompher par mes paroles, comme par mes actions. Car ayant trouvé le Royaume de mon pere chancelant & ébranlé par fa mort, j'ay fceu l'affermir par le fupplice de fes meurtriers, & faire trembler la Gréce par la ruïne de Thébes. Enfuite, éleu General contre les Barba res, j'ay porté mes armes & mes esperances plus loin qu'aucun autre devant moy; & traverfant l'Hellefpont, j'ay défait les Capitaines de Darius en bataille Fangée, conquis toutes les Provinces jufqu'en Cilicie, vaincu le Roy de Perfe luy-mefme, & moiffonné pour un jour tant de lauriers, que la Barque de Caron ne fut pas fuffifante pour paffer les morts, tant le nombre en eftoit grand. Enfuite, pour ne point parler de Tyr ny d'Arbelles, j'ay affujetty toute l'Afie, jufqu'aux Indes, & les Indes mefmes, & pris l'O cean pour borne de mon Empire. Non

content de ces exploits, j'ay traversé le Tanaïs, & vaincu les Scythes, triomphé de tous les ennemis de la Gréce, & laiffé des couronnes en partage à mes Capitaines. Que fi après avoir fait tant de chofes au deffus d'un mortel, les hommes m'ont pris pour un Dieu, cela leur eft pardonnable, & à moy auffi de l'avoir fouffert à l'eftabliffement d'un nouvel Empire. Enfin, tu vois devant toy le Conquerant de la moitié de l'Univers, à qui un banny difpute la préféance, après eftre mort efclave d'un petit Roy de Bithynie. Ajoûtez à cela, que j'ay fair toutes ces conqueftes en lion, & à force ouverte au lieu qu'Annibal n'a jamais agy que par fraude, & a efté dompté à la fin par fes propres armes ; auffi cruel envers les vaincus, que je leur ay esté clement. Mais il a bonne grace de me reprocer mes débauches, après les délices de Capoue, qui luy ont fait perdre le fruit de tant de victoires. Jamais mes plaifirs n'ont fouillé la gloire de mes armes, & j'ay attendu à triompher, que je n'euffe plus d'ennemis. Je pourrois dire plufieurs autres chofes pour ma dé

Famais mes plaifirs: faux exploits à AleIl n'eft pas neceffaire de faire alleguer de

xandre, qui en a affezfait de veritables.

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fenfe: mais je rougirois d'employer plus de paroles, pour une caufe fi jufte. Il ne reste plus qu'à prononcer fur ce differend.

SCIPION. Arrefte, Minos, j'ay quel que chofe à representer. MINOS. Qui es-tu ?

SCIPION. Scipion, qui ay vaincu Annibal & dompté Carthage.

MINOS. Et qu'as-tu à dire ?

SCIPION. Que je le cede à Alexandre, & que je le difpute à Annibal. MINOS. Tu as raifon; tu pafferas devant luy, & Alexandre devant tous. Qu'on ne m'en parle plus.

DIALOGUE

DE DIOGENE ET D'ALEXANDRE.

DIOGENE.

H

un autre homme !

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ALEXANDRE. Cela n'eft pas étrange, eftant né mortel.

DIOGENE. Mais Jupiter eftoit donc un impofteur de dire, que tu eftois fon fils, & ta mere nous en faifoit accroire, en difant qu'elle avoit couché avec um dragon.

ALEXANDRE. C'eft qu'il n'y a pas trop d'affurance aux femmes, ny aux Oracles; mais je le fouffrois, parce que cela imprimoit plus de refpect & d'obéiffance dans l'efprit des peuples.

DIOGENE. Enfin, à qui as-tu laissé ton Empire ?

ALEXANDRE. Je ne fçay, car je n'ay pas eu le loifir d'en difpofer : Mais en mourant, je donnay mon anneau à Perdicas. Qu'as-tu à rire ?

DIOGENE. C'eft qu'il me fouvient du temps que la Gréce te proclamoit fon General, & que fes Orateurs te donnoient rang entre fes principaux Dieux. Il y en eut mefme de fi infolens que de te facrifier & de te baftir des Temples comme au fils de Jupiter; mais où es-tu enfevely?

ALEXANDRE. En Babylone; car il n'y a que trois jours que je fuis mort: mais Ptolomée me doit emporter en Egypte, pour m'y faire adorer avec les Dieux du païs.

DIOGENE. Qui ne riroit, Alexandre, de voir que tu n'es pas encore fage après ta mort, & que tu te flates de

Fe le fouffrois: Je le l'accufe,parce que cela fais dire à Alexandre va à fa juftification. plûteft qu'à l'autre qui !

l'efperance de te voir adoré avec des monftres Quitte ces fottes vanitez, il n'y a point de commerce d'icy làhaut, & l'on ne retourne plus au mon、 de depuis qu'on en eft une fois party. Mais je voudrois bien fçavoir comment tu portes la perte de ton Empire, & ce que tu penfes, quand il te fouvient des Bactres & de Babylone, de ta grandeur & de ta gloire ? Quoy! tu pleures, pauvre fot: Ariftote ne t'a-t-il point appris qué tout cela n'eftoit que vanité?"

ALEXANDRE. Que dis-tu là, Diogene, du plus lafche de tous mes flateurs? Ha! nem'oblige point, je te prie, à publier les défauts, & à te dire comme il a abufé de la bonté de mon naturel, & de la paffion extrême que j'avois pour les Lettres: tantoft me cajolant fur ina beauté, & tantoft fur mes richesses, qu'il mettoit hardiment au nombre des biens, afin qu'il n'euft point de honte de les demander, ny de les recevoir. Voilà ce que j'ay profité de fa fcience de prendre pour biens, des chofes qui ne le font pas, & dont la perte maintenant m'afflige.

DIOGENE. Sçais-tu ce que tu feras pour te guérir, puifqu'auffi-bien il n'y a point d'ellebore en l'autre monde ; Va

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