te rompre la tefte de mes cris comme les autres. CARON. Cela n'a rien de commun avec le paffage. MENIPE. Remets-moy donc en vie. CARON. Bon, pour me faire battre par Eaque ? MENIPE. Laiffe-moy donc en repos. CARON. Montre ce que tu as dans ta Beface. MENIPE. Il n'y a que des lupins, ou quelque œuf couvé. CARON. D'où nous as-tu amené ce Chien, Mercure, qui ne fait qu'aboyer tout le monde, & fe mocquer de ceux qui pleurent ? MERCURE. Tu ne fçais qui tu as paffé, Caron; c'eft un homme parfaitement libre, & qui ne fe foucie de rien. CARON. Que fi je te r'attrape jamais! MENIPE. On n'y retourne pas deux fois. Pois plat & amer. rés, ne rejettez pas la priere d'un Amant. PLUTON. Qui es-tu, qui parles ainfi ? PROTESILAS. Le premier des Grecs qui mourut au Siége de Troye. PLUTON. Et que veux-tu ? PROTESILAS. Retourner au monde pour quelques heures. PLUTON. C'eft une priere que font tous les Morts, & que perfonne n'obtient. PROTESILAS. Ce n'eft pas l'amour de la vie qui me fait parler, mais le defir de voir ma Maiftreffe, que je laiffay dans' fa chambre nuptiale , pour me hafter de partir avec les Grecs ; & je fus fi malheureux que d'estre tué par Hector à la defcente du Navire. L'amour que j'ay donc pour cette Bellene me donne point de repos, & je voudrois la pouvoir encore entretenir un moment. PLUTON. N'as-tu pas beû de l'eau du Fleuve Léthé comme les autres ? PROTESILAS. J'en ay beû; mais le mal eftoit plus fort que le remede. PLUTON. Elle ne tardera point à venir, & t'épargnera la peine de l'aller trou ver. PROTESILAS. Mais je ne puis fouffrir l'attente: Tu connois l'impatience des Amans, Pluton; car tu as autrefois aimé. PLUTON. Que te fervira-t-il de la revoir un moment, pour la reperdre pour toûjours. PROTESILAS. Peut-eftre que je la perfuaderay de venir avec moy, & par ce moyen,j'accroiftray ton Empire d'une Ombre. PLUTON. Cela n'eft pas jufte, Protefilas, & ne s'eft jamais fait. PROTESILAS. C'eft qu'il ne t'en fouvient plus; car tu rendis à Orphée fon Eurydice, & à Hercule Alcefte,qui eftoit ma parente. PLUTON. Voudrois-tu paroistre devant elle en cet eftat, où tu la ferois mourir de peur ? Et penfes-tu qu'elle te vouluft regarder, ny qu'elle te puft re connoiftre? PROSERPINE. Faifons luy grace, Pluton, & commandons à Mercure de le remettre là-haut, & de le frapper de fa verge, lors qu'il fera arrivé au monde, pour luy faire reprendre fa premiere forme, & le rendre tel qu'il eftoit au fortir de fa chambre nuptiale. PLUTON. Puifque Proferpine le veut, j'y confens. Remene celuy-cy, Mercure; mais qu'il fe fouvienne qu'on ne luy a accordé qu'un jour. DIALOGUE DE MAUSOLE ET DE DIOGENE. DIOGENE. Pe dédaigneux & le mé Ourquoy fais-tu tant le prifant, comme fi l'on n'eftoit pas digne de te regarder? MAUSOLE. Parce que j'ay efté Roy, Diogéne & que j'ay commandé un grand Païs, fans parler de ma beauté ny de ma valeur. D'ailleurs, j'ay un superbe Tombeau dans Halicarnaffe, enrichy de figures de marbre; de forte qu'il y a peu de Temples qui égalent mon fepulcre. Après cela, n'ay-je pas raifon de faire le vain? DIOGENE. Quoy! pour ta beauté ? ta valeur, ton Royaume & ton fepulcre? Mais, mon amy, tu n'as rien icy bas de tout cela; & fi tu veux prendre quelqu'un pour Juge, on te dira que ta carcaffe n'eft pas differente de la mienne. Pour ton fepulcre, c'eft à ceux d'Halicarnaffe à s'en vanter, & à le montrer aux Eftrangers , comme une des merveilles du Monde, & un chef-d'oeuvre d'Architecture; mais je ne voy pas à quoy il te peut fervir, fi ce n'eft à t'accabler fous fa pefanteur. MAUSOLE. Comment? Tout cela me feroit inutile ; & Maufole ne feroit en rien different de Diogéne? : DIOGENE. Si fait bien; car Mausole pleurera fa felicité paffée, & Diogéne s'en rira. Il parlera de fon fepulcre, conftruit par fa belle Artemife, & Diogéne ignorera s'il a un fepulcre; car cela luy est indifferent mais il fe fouviendra qu'il a laiffé une memoire immortelle , pour avoir mené la vie la plus accomplie qu'un mortel puiffe mener, plus haute mille fois que ton fepulcre, miferable Maufole, & plus durable que luy, quand il feroit bafty fur un roc. Sa belle Artemife: | fa foeur, auffi-bien que Il ne fert de rien de fa femme. dire icy qu'elle eftoit. |