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peu après faifant reflexion au fujet qui l'avoit causé, il esperoit de ramener cette Reine à. fon devoir: c'eft pourquoi étant un jour à caufer ensemble, & lui parlant de l'amour qu'il avoit pour elle, en verité, Madame, lui dit-il, vous ne fongez gueres que vous êtes ma femme, & que je fuis votre Roy, de ne vouloir pas me permettre de vous approcher, à moins que je ne falle mettre fur ma monnoye votre nom auprès du mien. Cependant quoique cela ne fe foit jamais vû, comme je n'ay pas de plus forte paffion que de vous plaire, je vous accorderai votre demande, fi vous faites avec votre arc & vos fléches ce que je ferai avec les › miennes.

La Reine y confentit, & le foir venu, le Roy la ména dans

une gallerie, où ayant fait pofer un petit baffin au bout de cette gallerie, après l'avoir fait remarquer à la Reine, & éteindre toutes les lumieres, ils fe mirent à l'autre bout; alors ce Prince prenant fon arc tira trois fléches dans le baffin, dont on entendit le bruit à mesure qu'elles y frappoient. Enfuite la Reine tira les fiennes d'une ma niere hardie: 'on entendit le font

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que caufa la premiere, mais les deux autres ne firent aucun bruit. Le Roy s'imaginant que la feconde & la troifiéme fléche n'avoient pas donné dans le baf. fin, dit en lui-même : Je fuis prefentement exempt de faire ce que ma femme me demande, & elle ne pourra plus me refu fer le droit de mari. Il fit auffitôt allumer des flambeaux ; il vit que les trois fleches quil.

avoit tirées avoient percé en trois endroits le baffin, & que la premiere que la Reine avoit tirée avoit frappé dans le milieu;mais que la feconde & la troifieme étoient attachées au bout l'une de l'autre, ce qui le furprit & le chagrina tout ensemble, de voir qu'il faloit accorder à la Reine ce qu'elle lui demandoit. Cependant comme ce n'étoit: là fon deffein, pour éluder la chofe il feignit le lendemain d'être malade. Cette Princeffe · ne voulant pas l'importuner de fa demande, ne fongea qu'à lui faire recouvrer fa fanté.

pas

Dans ce temps on eut avis à la Cour, qu'il y avoit une grande quantité de Licornes aux environs de quelques villes de ce Roïaume, qui faifoient de terri

bles ravages dans la dans la campagne.

Cette fâcheule nouvelle fournit.

au Roy un prétexte d'éluder l'éxecution de la parole qu'il a voit donnée à la Reine, & feignant d'être toujours malade, il lui dit qu'auffi-tôt qu'il feroit guéri, il vouloit aller avec elle: donner la chaffe à ces animaux. Elle approuva son deffein, & quelques jours après témoignant qu'il étoit en parfaite fanré, il fit dire à tous les Officiers de fa Cour qu'ils euffent à fe tenir prêts pour partir dans troisjours, afin d'aller vers les Villes qui étoient inquietées par les Licornes. Chacun s'étant misen état pour le jour marqué, il partit avec la Reine & toute fa Cour.

Pendant toute la route, les Courtifans avoient grand foin de conter au Roy & à la Reine des hiftoires agréables pour les des ennuier de la longueur du

chemin, qui étoit des plus ins commodes & des plus fàcheux. · Voici une avanture également furprenante & tragique qui arriva durant le voyage à un des Ecuyers du Roy, qui étoit fort amoureux d'une des filles d'honneur de la Reine: mais foit qu' elle ne l'aimât point, ou qu'elle fût bien-aife de le faire languir pour fe rendre plus précieufe auprès de lui, elle rejettoit continuellement fes voeux. Cette.ri gueur,loin de rebuter cet amant, ne fervoit qu'à augmenter fon amour; enfin ayant rencontré cette Demoiselle qui étoit feule dans un lieu écarté, il l'aborda d'un air tendre, & lui dit plufieurs douceurs; mais voyant qu'elle ne vouloit point l'écou ter, & que plus il lui donnoit de marques de fon amour, plus elle lui étoit inhumaine,il haussa

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