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étant pauvre,

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demeure toûjours pauvre mais ce qu'il y a de merveilleux, c'eft que les ⚫ Muses ne diftinguent point les hommes par la naiffance ni par les richeffes, & qu'il n'y a que leurs plus affidus courtilans qui foient les plus favorilez Quelques indigens qu'ils ayent été pendant leurs études, les récompenfes s'enfuivent tôt ou tard elles leur donnent souvent le moyen de monter aux premieres dignitez; & fi leurs commencemens ont été obfcurs & penibles, leurs progrès font également pleins de douceurs, d'honneur & d'abondance. Au contraire les gens de guerre font. expofez à des travaux & à des perils continuels, & combien, Meffieurs, en avons nous vû qui ayent été récompenfez felon leur. merite. Nous voyons que

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les gens de lettres out toujours dequoi fuffifamment s'entretenir, & que l'homme de guerre manque prefque toujours de tout. Difference fort défagréa ble pour les gens de guerre, & qui paroît très injufte, mais qu'il eft abfolument impoffible de réformer, fuivant le train qu'ont pris les chofes du monde, car, tout eft plein de Charges, d'Of fices, de Benefices & de fonctions qui ne peuvent être données qu'à des gens de lettres ; au lieu que les gens de guerre ne peuvent prefque jamais être récompenfez que de la liberalité, & de la bourfe de leur maître.

Voilà l'état certain de l'une & de l'autre profeffion. Il ne refte plus fur ce fujet qu'une queftion à traiter, fçavoir la quelle de ces deux profeffions a la prééminence fur l'autre écou

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tons leurs raisons. Les lettres difent que fans elles les armes ne fe pourroient maintenir, parce que la guerre fe fait auffi par certaines loix & certaines regles aufquelles elle eft fujette, & que par cette raison il faut conclure que les armes dépendent des lettres & de ceux qui les exercent. Elles ajoutent que fans elles les beaux faits d'armes feroient enfevelis dans l'oubli, & que fi les Guerriers font animez de l'amour de la gloire, ce font elles qui la diftribuent, & qui donnent aux Heros cette réputation éternelle, qui eft la plus illuftre récompenfe de la vertu.

Les armes au contraire répli quent que les loix mêmes ont befoin de leurs fecours, puifque ce font les armes qui défendent les Républiques, qui confervent les Royaumes, qui gardent les

Villes, qui affurent les chemins & qui affranchiffent les mers de Corlaires, qu'autrement toutes chofes feroient dans la confufion & dans le délordre qu'ap porte avec foi une guerre qui n'a point d'autre droit ni d'autre regle que la force & la violence. A cette confideration les armes en ajoutent une autre, que ce qui coute le plus, merite d'être le plus eftimé; elles avouent que pour parvenir à un haut degré de doctrine & de fageffe, il faut beaucoup de temps & de peine; que la fcience ne s'acquiert qu'avec de grandes incommoditez, de longues veilles, & des travaux affidus:mais elles foutiennent que pour faire un veritable homme de guerre, il y a bien plus de peine fans comparaifon que pour faire un homme de lettres. Quel courage & quelle intrepidité ne

faut-il point à un homme de guerre: il eft à tous momens en danger de perdre la vie, de tomber entre les mains des ennemis, d'être expofé à fouffrir la faim, la foif, la nudité & mille autres chofes fâcheufes. Par ces raifons les armes l'emportent fur les let tres, & je fuis très ravi d'avoir pris ce parti, & très content de cet exercice de chevalerie errante. Quoique nous vivions dans un fiécle corrompu, & qu'il foit à craindre que la poudre & le plomb ne m'ôtent la vie, néan, moins je ferai tous mes efforts pour éternifer ma memoire dans I'Univers,& je fuis perfuadé que fi je me mets une fois en campagne avec mes prétentions, j'acqué. rerai peut-être plus, ou du moins autant de gloire que les Chevaliers errans des fiécles paffez, pour m'être exposé à des dan

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