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comme des rubis. Or il faut fçavoir que les chiens d'Afrique font plus méchans que les lions; & il femble que la nature leur ait donné cette qualité redoutable pour defendre les hommes contre les attaques & la ferocité de ces bêtes cruelles. D'abord que ces deux fiers animaux furent lâchez & en prefence l'un de l'autre avant que d'entrer en lice pour combattre, le chien d'Afrique fe mit fur fon cul, & paffant la pate fous fon nez comme fi c'étoit pour retrouffer la moustache que fon maître luy avoit faite, regarda fon ennemi fort tranquillement. Le dogue voyant cette action, aboya auffi-tôt, & courut fur le chien d'Afrique, mais celui-ci fans branler de fa place fe tint ferme, & lui donna comme par mépris un foufflet de fa patte gauche, la A a

droite étant toujours occupée à retrouffer fa mouftache. Cependant voyant que le dogue vouloit le mordre, il s'éleva fur les deux jambes de derriere pour le prendre au col. Le dogue en même temps fe dreffa fur les fiennes, & ils fe donnerent l'un à l'autre de rudes coups de dents. Le chien d'Afrique en colere de cette résistance, fauta par deffus le dogue, & revint à la charge en hurlant d'une maniere épouvantable. Le dogue animé au combat en fit de même, & fe jetta encore à lui. Dans ce moment le chien d'Afrique luy donna de fes deux pattes par les yeux, & le prit à la gorge, il le mit deffous lui, & alloit fans doute le devorer, lors qu'un hardi foldat qui fe trouva là par hazard prit le chie d'Afrique par la gueule, & lu

defferrant les mâchoires avec les mains, fauva la vie au dogue. Chacun fut charmé de cette action, & fur tout le maître du. dogue, qui donna une pistole au foldat pour reconnoître le fervice qu'il lui avoit rendu. Plufieurs perfonnes à fon imitation lui firent des liberalitez, enforte qu'il s'en retourna chez lui fort content, & peut-être avec plus d'argent qu'il n'en avoit lorsqu'il en étoit forti. Cet exemple nous fait voir qu'il est toujours bon de rendre fervice aux gens, quand même on ne les connoîtroit

point, parce qu'un petit service attire quelquefois plufieurs re

connoiffances.

Dans ce temps parut une trou pe de Bohémiens avec des violons, des castagnettes & des tambours de bafques, qui danfoient en perfection des menuets & des

farabandes; tandis que les uns faifoient paroître la jufteffe de Teurs danfes par la delicateffe de leurs oreilles, les autres montroient la foupleffe & l'agilité de leur corps par les fauts extraor dinaires qu'ils faifoient en danfant. Il y en eut un qui fit quelque chofe de fort furprenant; il monta fur deux chevaux d'Éfpagne, ayant un pied fur l'un & un pied fur l'autre, & les pouffa à toutes brides plus de cent pas. Après les avoir arrêtez tout court, il fauta à la renverfe, & mit les mains à la place de fes pieds, qu'il tint en l'air pendant que les chevaux couroient. Enfuite ayant retiré une de fes mains, & fe foutenant de l'autre, il fe mit tout d'un coup en felle fur un des deux chevaux auquel il fit faire le plus beau manege du monde. Tout cela

donnoit beaucoup de plaifir à voir, lorfque le Ciel dans un inf tant parut obfcurci d'un nuage affreux, & fon obfcurité percée d'un grand nombre d'éclairs qui étoient les avant coureurs d'un terrible orage. La crainte obligea un chacun à fe retirer; & comme la retraite fut precipitée, les uns pour les autres ne pouvoient quafi paffer la porte du Parc. L'orage enfin tomba avec une telle abondance d'eau, qu'il fembloit que toutes les cataractes du Ciel étoient entr'ou vertes pour submerger la terre. Cependant ceux qui étoient

dans leurs carroffes s'en confoloient aisément, mais les autres qui n'étoient pas à couvert, en étoient fort chagrins. Dans ce temps les caroffes prirent leur file; & comme ils alloient fort vîte, une des roues de celui de

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