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fur

firs des fens, & qu'ils en font de meurez dans les termes du devoir ce qui eft très rare, tout quand on s'aime avec tant d'ardeur. Cependant comme il n'y a point de roles fans épines), ni d'amour fans traverle la paffion de ces deux amans fut bien-tôt mêlée de regrets & de larmes. La beauté de Mademoifelle de Saint Quentin qui commençoit à faire du bruit dans le monde lui attira plufieurs adorateurs, chacun tâchoit de s'en faire aimer; mais voyant que tous leurs efforts étoient inutiles, & qu'il n'y avoit que le Comte de Merincour d'heureux, ils réfolurent de s'en défaire, ou d'en. lever fa maîtreffe. Le Ciel préferva le Comte de ce malheur mais non pas Mademoiselle de Saint Quentin, qui fut enlevée par un Allemand nommé le Ba

ron de Salberque. Le déplaifir qu'elle en eut fut fi grand, qu'el le en fut malade, & mourut au bout d'un mois à Cologne,ayant laiffé dans la mémoire de ceux qui l'ont connue l'image d'une vertu & d'une beauté parfaite. Le Comte qui avoit été trèsfâché de fon enlevement, fut au désespoir quand il apprit fa mort. Il en répandit des larmes. Il s'enferma durant quelque temps chez lui ne voulant voir ni parler à perfonne; & un jour qu'il étoit plus chagrin que jamais de la mort de cette aimable Demoiselle, il mit la main à la plume, & la laiffant conduire aux mouvemens de fon cœur, voicy ce qu'il écrivit fur cé fujet.

Les regrets d'un Amant fur la mort de Sa Maîtresse.

O mort impitoyable, pourquoi me ravis tu la plus aimable & la plus aimée de toutes les beautez du monde ! Tu fçavois combien j'avois de paffion pour elle, & que je me faifois un plaifir fenfible de lui donner continuellement des marques de mon amour & de mon refpect, & qu'éloigné d'elle j'étois proche de tous les maux enfemble, & fur le point d'expirer de douleur. Cependant, inhumaine, tu m'ôtes pour jamais la vûe de cette chere perfonne qui faifoit tou tes mes délices, & qui étoit l'objet de tous mes défirs. O cruelle, l'horreur des vivans, que tu merites de haine & d'imprécations. Tous les momens de ma

vie ne feront employez qu'à regretter la perte que j'ay faite, & à t'accabler d'opprobres & d'injures les plus terribles. Commençons donc à ébaucher ici ton effroyable caractere, qui est en éxecration à tout l'Univers. Le mérite le plus diftingué, & la beauté la plus parfaite ne font pas à l'abri de tes funeftes coups. Enfin ta barbarie & ton inhumanité s'exercent jour & nuit fur tout le monde, fans jamais y donner le moindre relâche. O trop méchante & déteftable que tu es ; que les Enfers s'entr'ou vrent pour t'engloutir au plus profond de leurs abîmes; que tous les Démons fe déchaînent pour te faire fouffrir les plus affreux fupplices, & qu'après une infinité de maux ton infâme carcaffe foit livrée à la rage des har pies & des furies pour y Dd iiij.

refter

eternellement : voilà, infigne & cruelle meurtriere

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une partie

de mon reffentiment,qui eft bien moins representé dans mes paroles, que gravé dans mon cœur. En attendant que j'acheve ton horrible portrait, voicy le fouvenir des charmes de la beauté que j'adorois qui fe prefente à mon imagination, & qui me fait connoître que j'ai tout perdu en la perdant. Rien ne peut m'en confoler, elle étoit incompara. ble, & tout ce qu'on pourroit dire à fa gloire feroit au-deffous de ce qu'elle méritoit. Cependant je ne sçaurois m'empêcher d'en parler, & de publier à jamais fes louanges & fes vertus. Elle avoit l'ame la plus belle les manieres les plus nobles & les graces les plus touchantes qu'on puiffe imaginer. Son port étoit majestueux, sa taille admi

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