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le befoin que nous avons les uns des autres l'utilité que nous retirons de cette union dans les occafions qui fe préfentent, & l'agrément qu'elle répand fur nos jours.

Ce fentiment n'eft point libre, & il ne dépend pas de nous d'aimer ou de hair. Nous aimons ce qui nous paroît aimable, & nous haïffons ce qui nous déplaît. Une perfonne ne nous paroît aimable, qu'autant qu'elle poffede des qualités qui nous font analogues; & ce font ces qualités que nous aimons parce qu'elles nous flattent ou s'accordent avec les nôtres. Le fujet ou canevas auquel elles font attachées par fa conftitution, n'a rien d'aimable en luimême ; & fi ces qualités viennent à changer ou difparoître, le fujet nous devient au moins indifférent. L'amitié

peut même s'altérer par le changement

des circonftances.

Ainfi l'amitié est toujours intéreffée, & nous n'aimons jamais ni perfonnes ni chofes pour elles-mêmes, mais pour nous & par rapport à nous. Nous ne les chériffons que pour notre intérêt particulier. Le degré de l'amitié eft proportionné au degré de fatisfaction & de

contentement que nous éprouvons, & qui aide à notre félicité; & la durée de ce fentiment eft celle de la conformité & du rapport des différentes chofes qui nous uniffent.

Il est très-utile pour l'agrément de la vie, & à caufe des reffources que procure une liaison plus intime, d'avoir des amis. Mais, pour en avoir, il faut être foi-même aimable: car nous ne pouvons être aimés, fi nous ne méritons de l'être.

Ce feroit le comble de l'aveuglement 'd'exiger que l'on nous aimât, & de croire que nous devons être aimés fans réfléchir fur nous-mêmes, fans nous apprécier, & fans favoir fi réellement nous fommes aimables.

Les Courtifans font néceffairement aimés de ceux à qui ils font la cour, parce qu'ils femblent ne penfer jamais que d'après eux. Ils fe plient à leurs caracteres, & ils entrent dans leurs goûts & leurs inclinations. Cette conformité quoique forcée, les rend aimables aux yeux des Princes.

Si nous voulons avoir des amis, nous 'devons d'abord choifir les perfonnes que nous trouvons les plus conformes à

nous; & comme il n'eft pas poffible que cette conformité foit parfaite, nous devons nous plier à leurs caracteres, à leurs goûts, à leurs inclinations, & leur cacher nos défauts, de maniere qu'ils puiffent à peine s'en appercevoir. La douceur, la complaifance, la prévenance, l'honnêteté contribuent à rendre l'amitié durable, & nous font jouir des douceurs qu'elle nous procure.

C'eft ne pas connoître les hommes, de croire qu'entre amis on ne doit pas fe gêner. Il eft mille occafions dans la vie où l'on ne doit point fe laiffer aller à fa pente naturelle. Il faut fe prêter aux perfonnes, aux lieux, aux circonftances. La gêne & la contrainte font indispensables pour vivre dans le monde; & fouvent, en fe montrant tel que l'on eft, on devient très-défagréable. Entre amis on peut vivre fans contrainte; mais l'amitié exige elle-même que nous nous gênions quelquefois; & la complaifance, qui entretient l'union, nous fait fouvent faire ce que nous ne voudrions pas.

Des Femmes.

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La plupart des femmes font moins

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offenfées qu'on médife un peu de leur vertu,que de leur efprit ou de leur beauté. Aucune n'ofera l'avouer; mais cet exposé n'en eft pas moins vrai.

On ne décide point fi le premier mérite d'une femme eft d'être belle, ou d'avoir de l'efprit; mais, dans l'usage ordinaire, la premiere question qu'on fait fur une femme que l'on ne connoît pas, c'eft: Eft-elle jolie? La feconde : A-t-elle de l'efprit? Il eft rare qu'on faffe une troifieme queftion.

L'on n'eft jamais véritablement fâché d'être aimé. C'eft toujours ou la fierté, ou la haine, ou l'amour, qui force une femme à paroître fâchée quand on l'aime. Elle le paroît; mais elle ne l'est pas fin

cérement.

1 Si c'est un homme indigne d'elle qui l'aime, elle fe fâche par fierté; mais elle s'applaudit en elle-même de cette conquête, perfuadée qu'elle eft l'effet de fes attraits, qui font fi puiffans qu'ils forcent les plus petits à ofer monter juf qu'à elle.

Si c'eft un homme qu'elle fe croit obligée de hair, en même temps qu'elle lui donne des marques de fon averfion, un je ne fais quoi, qui eft fait comme

la vanité, lui dit à elle-même qu'il faut qu'elle foit bien aimable, puifqu'on lui donne de l'amour en échange de fa haine.

Si c'eft un homme qu'elle aime véri tablement, elle ne paroît être fâchée de fon amour que pour s'en faire aimer davantage.

De la fociété de l'Homme & de la Femme.

DIEU a fait la femme pour fervir de compagne à l'homme, & perpétuer l'ef pece humaine. Mais il a établi entre elle & lui une fubordination marquée par la structure différente de leurs corps & la difpofition de leurs organes.

L'homme, visiblement conftruit pour vaquer aux ouvrages qu'exige l'entretien de fa vie, a reçu la force en partage. Le courage le défend de ce qui peut le troubler. Son efprit, capable d'entreprendre, forme des projets qu'il peut exécuter. Il peut foutenir un travail pliqué d'efprit & de corps. Le Créateur lui a donné les talens, l'induftrie & l'adreffe néceffaires pour fes befoins, fon utilité & fon agrément. Mais le dégoût

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