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m'a fait defirer de vous dédier cet ouvrage. La bonté que vous m'avez témoignée en daignant ne pas me refufer, m'a pénétré de la plus vive reconnoiffance. C'eft donc, MONSIEUR, un bienfait que je puis ajouter à tous ceux que je vous dois. Puiffent toutes les claffes de citoyens rendre hommage à vos vertus! Puiffent encore ceux qui vous fuccéderont ne jamais oublier le chemin que vous leur avez tracé, & être éclairés du même efprit de fageffe qui vous a toujours guidé!

J'ai l'honneur d'être avec le plus profond respect.

MONSIEUR,

Votre très-humble & très-obéiffant ferviteur, P. FR. DIDOT le jeune.

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PREFACE

DE L'ÉDITEUR. POUR peu qu'on faffe attention à l'origine

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des Arts on fera bientôt convaincu qu'ils doivent leur exiftence à nos befoins. A mefure que l'efpece humaine s'eft multipliée, ils font devenus néceffaires, relativement aux divers climats que les hommes ont habités & aux différentes efpeces de nourriture qu'ils retiroient des terres plus ou moins fertiles ou plus ou moins abondantes en productions naturelles. Si l'imitation, la curiofité, le hazard même, en ont fait naître plufieurs chez certains peuples; la difette des fruits de la terre, l'obligation de vivre dans des climats à la température defquels ils n'étoient pas faits, de fe mettre à l'abri des injures de l'air, & de fe procurer une plus grande aifance, engagerent d'autres à donner de l'effor à leur génie,

observer tout, à profiter de diverfes expériences, & à inventer infenfiblement les arts. de néceffité, de commodité & de luxe, dont les progrès ont augmenté par l'affiduité des recherches & la variété des travaux."

Quelque bien conçus que foient les projets les plus vaftes, fruits ordinaires d'une imagination échauffée, ils ne peuvent fe réaliser qu'en imitant la Nature, qui renferme dans fon fein & nous préfente quelquefois les modcles de plufieurs inftruments néceffaires à

l'exécution de nos deffeins. Nos connoiffances n'étant relatives qu'aux expériences & aux réflexions que nous faifons fur les êtres qui nous environnent; en nous occupant de la réuffite d'un objet, le hazard nous procure fouvent ce que nous cherchons: c'eft alors que les regles & les inftruments viennent au fecours de la force & de la foupleffe de nos mains, & que la fpéculation ou la connoiffance inopérative de chaque Art influe fur fa pratique, en réfolvant les difficultés que celle-ci rencontre quelquefois,

Quelque grands cependant, quelque multipliés qu'aient été les befoins des hommes dans les premiers temps, les arts n'ont été inventés que peu-à-peu; leur progrès s'est fait lentement, & il a fallu des fiecles pour les porter au degré où ils font parvenus, quoiqu'il y ait toujours eu, même chez les peuples les plus groffiers & les plus barbares, des artiftes très-habiles dont le bon goût auroit empê ché la décadence des arts s'ils euffent été plus connus, plus à portée d'être imités ou furpaffés par une louable rivalité. Depuis que les précieux talents de ces grands hommes ont été enfévelis dans le néant, combien d'Arts ne font pour ainfi dire que de fortir de leur enfance, & combien en eft-il qu'on peut regarder comme étant encore dans leur berceau !

Il est étonnant que les fervices importants que les arts ont rendus à la fociété, ne lui faffent pas eftimer également les talents utiles & ceux qui les exercent. Ignore-t-elle que fans

eux la terre ne produiroit que des ronces; que c'eft Pinduftrie qui a rendu la Nature plus belle; que c'eft elle qui décore tous les endroits où elle s'attache; qu'elle fait fortir de fes mains les ouvrages les plus fomptueux; qu'elle nous procure toutes les commodités de la vie & qu'elle donne aux mets les plus exquis ce coup d'œil & cette variété qui satisfont tout à la fois la magnificence & la déli

cateffe ?

Sous le nom d'Art, on comprend ordinairement tout le fystême de connoiffances qu'il eft paffible de réduire à des regles pofitives, invariables & indépendantes du caprice & de l'opinion, mais comme il y a des regles pour les opérations de l'ame comme pour celles du corps, qu'il y a certains Arts où la main travaille plus que l'efprit, on s'eft cru fondé à les diftinguer en Arts libéraux & en Arts mécha niques, & à donner aux premiers la fupério rités fur les feconds: il eft cependant hors de doute que ceux-ci font beaucoup plus anciens que les Arts libéraux, peres des Arts agréables; que l'efprit humain commença à pourvoir aux befoins du corps avant de penser à devenir aftronome & géometre, à mesurer, à calculer tout, à s'élever jufqu'aux cieux, à trouver dans les corps céleftes la régularité de leurs mouvements, à tirer des fons mélodieux des chofes inanimées, à les varier à l'infini, & à remuer inpérieufement l'ame par une harmonie admirable.

Parce que les Arts méchaniques dépendent

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d'une opération manuelle & affervie en quelque maniere à une certaine routine, doiventils être relégués dans la claffe la plus inférieure de la fociété? Parce que l'indigence qui nuit à tout ce qu'elle accompagne, aura forcé

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des hommes induftrieux à travailler de leurs mains, doit on les méprifer, eux dont le goût & le génie auroient peut-être excellé dans des profeffions plus eftimées, fi la fortune leur eût procuré les moyens de s'y exercer? Parce que certains préjugés ridicules ont obtenu force de loi, doit-on plus refpecter les génies qui éclairent les nations par leurs écrits que les mains dont elles retirent les avantages les plus réels & les plus importants? Parce qu'il aura plu à différentes fortes de gouvernement d'établir une inégalité de convention entre l'homme oifif & le travailleur celui-ci eft-il moins en droit de réclamer fes prétentions, & doit-il renoncer à ce defir de fupériorité, ou au moins d'égalité que rien ne peut éteindre en lui?

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En fait d'Arts, on devroit, ce femble, donner la préférence à ceux qui font les plus utiles quoiqu'ils foient les moins eftimés. L'Art néceffaire devroit l'emporter fur l'Art agréable, & celui-ci ne devroit occuper que la derniere place. Quelle difference n'y a-t-il réellement pas entre les Arts dont la fociété ne peut se paffer, & ceux qui ne fervent qu'au luxe ou au plaifir! On ne fauroit trop protéger, multiplier , encourager même les premiers, & prendre garde à ce que les feconds ne paffent les

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