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La plupart des plantes Emollientes font Réfolutives, comme je l'ai dit ci-devant.

Plufieurs plantes de la Claffe fuivante ont auffi la propriété de réfoudre les tumeurs & d'appaifer l'inflammation, entre autres la Morelle, la Jufquiame, &c. Voyez la claffe des plantes Afsoupiffantes & Anodines.

Prefque toutes les Gommes étrangères, comme l'Ammoniac, le Galbanum, l'Opopanax & les autres, font réfolutives, & entrent dans la plupart des emplâtres.

QUATRIÈME CLASSE.

PLANTES ANODINES ET ASSOUPISSANTES.

LES remèdes qui calment les douleurs s'appellent Anodins; & ceux qui provoquent le fommeil, Affoupiffans, Hypnotiques ou Narcotiques. On range dans la claffe de ces plantes, à côté du Pavot & de l'Opium qui en eft l'extrait, la Ciguë, les Solanum, la Belladona, le Stramonium, & les autres plantes auxquelles on croit la vertu calmante & affoupiffante. Mais eft-il bien vrai que toutes ces plantes ne diffèrent entre elles que du plus au moins, qu'elles font compofées des mêmes principes, & qu'elles agiffent fur le fang de la même manière? Ce n'eft pas toujours à l'analyse chimique qu'il faudroit s'en rapporter fur les principes des corps. Il y a déja quelque temps qu'on fait à quoi s'en tenir fur l'infidélité de cette voie, pour connoître la plupart des mixtes, & fur-tout les végétaux. L'analyfe détruit & diffipe ce qui fouvent conftitue la vertu d'une plante. Les eaux diftillées des plantes, pour la plus grande partie, font au deffous de l'eau de rivière

filtrée. Le feu eft quelquefois créateur de principes qui n'existoient pas avant qu'un mixte fût foumis à fon action. Il est donc plus convenable de ne raifonner fur les végétaux que d'après les faits & l'expérience; &, dans ce cas, on auroit grand tort de penfer que l'Opium & la Ciguë, la Belladona, &c. aient les mêmes vertus. Les prêtres Egyptiens & ceux d'Athènes avoient trouvé dans l'ufage fuivi de la Ciguë, un moyen sûr de dompter & d'éteindre une paffion que les Orientaux excitent & réveillent avec l'Opium. J'ai bien fouvent vu de mauvais effets de l'Opium imprudemment adminiftré; jamais je n'ai obfervé qu'il donnât des mouvemens épileptiques, des vomiffemens convulfifs, des contrac tions de nerfs effrayantes, telles que celles que procurent la Ciguë aquatique & le Solanum maniacum. On s'accoutume volontiers à l'Opium, & même on ne s'y accoutume que trop. Tous les peuples nombreux qui fuivent la loi de Mahomet, ufent affidument de l'Opium pour fe dédommager du vin & de l'eau-de-vie qui leur font interdits. Voudroientils le remplacer par la Ciguë, le Stramonium, les Solanum, &c.?

Ces plantes diffèrent donc entre elles, & ne peu vent fe fubftituer les unes aux autres, ainfi que les Amers, les Apéritifs, les anti-Scorbutiques, &c. On ne doit donc fe fervir de la Ciguë, de la Mandragore, du Stramonium, de la Belladona, &c. qu'extérieurement. Je n'ignore pas cependant que Galien, d'après quelques anciens médecins, n'ait voulu employer la racine de Jufquiame, celle de Ciguë, ainfi que la racine & l'écorce de Mandragore. Je fais encore que depuis quelque temps, d'après un célèbre médecin de Groningue, on propofe, dans le traitement du cancer & de certaines obftructions skirrheufes, l'ufage des feuilles sèches de Belladona en infufion, à une dofe fi modique à

la vérité, & avec tant de prudence & de précaution, qu'on peut prendre ce remède fans effroi : mais je n'apprends pas qu'il ait fouvent réuffi; & je fais à n'en pas douter, l'ayant employé, qu'il occafionne toujours une grande féchereffe de la bouche & du gofier, une foif infupportable, souvent des vertiges, des chaleurs d'entrailles violentes, des foibleffes qui effrayent & qui en rebutent les malades.

Je fuis plus difpofé à croire que la Ciguë remplira les indications du médecin de Groningue. J'en ai donné ; & quoique, jufqu'à préfent, ç'ait été fans beaucoup de fuccès, du moins je n'en ai éprouvé aucune espèce d'accident. Ainfi, permis aux médecins d'employer ces fortes de remèdes, pourvu qu'ils les donnent eux-mêmes, & qu'ils ne perdent pas de vue le malade pendant leur action. Car enfin l'Opium même, fi juftement chéri de la plus grande partie des médecins & des malades, dont l'ufage, prudemment dirigé, n'a jamais été fuivi d'accidens fâcheux, & qui eft au contraire le fecours le plus affuré dans les maladies de douleur & d'irritation, ainfi que dans celles qui font longues & incurables; ce remède, difons-le, exige une grande habileté de la part du médecin qui le confeille; il faut qu'il n'y ait ni trop de fièvre ni trop de plénitude, ni cependant trop de foibleffe ou d'inanition; il faut craindre d'arrêter ou même de ralentir quelque évacuation naturelle devenue néceffaire. En effet, fi P'Opium augmente la fueur, on prétend qu'il diminue la fécrétion de l'urine; s'il donne au fang plus de fluidité & d'activité, donné mal-à-propos & à trop forte dose, il retarde le mouvement de la bile, il engorge les vifcères, embarraffe le cerveau, fufpend le cours des efprits, engourdit les nerfs, &, fuivant la différence des tempéramens, Occafionne quelquefois une variété d'accidens fin

guliers cependant, quelque dofe qu'un malade en prenne, en eût-il pris affez pour s'empoisonner, le fuc de citron eft un fecours très-prompt, qui efface, comme par enchantement, jufqu'aux moindres veltiges des accidens que la plus forte dose d'Opium auroit occafionnés. Je doute fort que le fuc de Citron foit autant le contre-poifon de la Ciguë, du Stramonium, de la Belladona, &c.; & d'après Wepfer, je crois qu'il n'y a que les émétiques prompts qui puiffent guérir les perfonnes empoifonnées par la Ciguë. Cet auteur, dans fon favant Traité de Cicutá aquaticá, rapporte l'hiftoire de plufieurs enfans qui avoient mangé des racines de la Ciguë d'eau. Deux moururent dans les convulfions fans avoir pu vomir; cinq guérirent, parce qu'ils avoient rejeté les racines qu'ils avoient mangées. Un feptième fut plus promptement guéri que les autres, parce que fon père avoit eu la préfence d'efprit de lui faire avaler de force une infufion de tabac à fumer : les autres avoient vomi avec de la thériaque délayée dans du vinaigre. On ne dira pas que la thériaque & le tabac foient antidotes de l'Opium.

Mais obfervons de plus près, & comparons entre eux les effets de l'Opium pris à grande dofe, & ceux de la Ciguë. L'Opium affez ordinairement agit comme le vin: pris fans ménagement, le pouls s'élève, les artères fe gonflent, le fang fe raréfie, la tête s'embarraffe, le fommeil faifit involontairement; & il eft plus profond & plus long, à proportion de la dofe plus ou moins forte de l'Opium qui a été pris. Il arrive néanmoins quelquefois, fur-tout aux tempéramens bilieux, que, loin de les faire dormir, leur raifon fe trouble, ils s'agitent, ils entrent en fureur tant que dure l'action de l'Opium, ils deviennent infenfibles aux coups. On fait que les Turcs, prêts d'aller au combat, prennent

une forte dose de ce remède, qui, dit-on, leur donne un courage & des forces bien au deffus de celles que procure l'eau-de-vie à nos foldats.

Si, par quelque accident malheureux, on a pris de la Ciguë, fur-tout de la Ciguë aquatique, qui eft plus violente que la Ciguë ordinaire, le poifon agit très-promptement. Celui qui en a pris tombe à terre fans connoiffance & en convulfion. Si la violence des mouvemens le force à fe relever, c'est pour aller retomber avec des convulfions plus fortes, & auffi violentes que celles des épileptiques. Les yeux, la bouche, l'eftomac fur-tout, font dans une contraction que l'homme le plus vigoureux ne pourroit ni arrêter, ni contenir dans un enfant de huit ans. L'Opium, pris à la plus grande dose, n'occafionne rien qui reffemble le moins du monde aux effets de la Ciguë, dont Wepfer nous a laiffé une fi effrayante description. J'ai vu plufieurs perfonnes qui, par imprudence, avoient pris trop d'Opium; une entre autres, après un affoupiffement très-long, dont je l'avois tirée à force de jus de citron, tomba dans un délire agréable, fans agitation, fans mouvement, & répondant toujours, les yeux fermés, à la converfation qui fe faifoit autour d'elle. Elle ne fentoit aucunement la grande acidité du jus de citron que je lui faifois avaler à forte dofe & fans fucre, & prétendoit que c'étoit du doucereux orgeat. L'Opium & la Ciguë n'ont donc pas les mêmes principes, n'agiffent pas fur le fang & fur les nerfs de la même manière, n'ont pas, je crois, les mêmes antidotes; & c'eft tout ce que nous voulions prouver. Le temps nous en apprendra davantage, puifqu'enfin quelques médecins zélés prennent fagement le parti d'abandonner la théorie purement fyftématique, pour ne s'attacher qu'à l'expérience, à l'obfervation, à l'étude de la nature, aux effets des remèdes, & à leur manière d'agir fur nos humeurs.

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