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modés, & peut-être empoisonnés. On a vu arriver plufieurs accidens à l'occafion de cette plante, laquelle, ayant été prife par inadvertence ou par ignorance, a caufé des tranchées douloureufes, fuivies de flux dyffentériques, de mouvemens convulfifs, de fyncopes, de pertes de vue & de fentiment, d'affections foporeufes & léthargiques, & de plufieurs autres effets très-pernicieux.

L'ufage extérieur de la Jufquiame n'eft pas de même, car on l'emploie utilement en cataplafme bouilli dans le lait, & appliqué fur les endroits affligés de la goutte. Les feuilles amorties ou cuites fous la braife, & mifes fur les mamelles, font paffer le lait. Taberna Montanus mêle avec le vin les graines pilées, pour les appliquer en cataplasme sur le fein des nouvelles accouchées.

Pour réfoudre les tumeurs, on emploie la Jufquiame dans les cataplafmes anodins. Par exemple, on fait bouillir dans une certaine quantité de lait deux poignées de cette plante, autant de celle de mandragore & de morelle, une once de graines de Jufquiame & de pavot; on paffe le tout par un linge, & on y ajoute un jaune d'oeuf avec un peu de fafran : ce cataplasme eft excellent pour la fausse efquinancie.

Clufius confeille pour concilier le fommeil, la graine de Jufquiame avec celle de pavot, pilées & mêlées enfemble, & appliquées fur le front. On tire auffi de la femence de Jufquiame, une huile excellente qui eft très-anodine. Gafpard Hoffmann affure que, fi on en frotte' les tempes, elle procure le fommeil, & calme les douleurs dans les parties qui en font affligées.

Voici une espèce d'huile ou de baume tranquille qui m'a été communiqué par un de mes amis. comme un fecret de famille, dont j'ai vu des effets furprenans dans l'efquinancie & dans les maux de

gorge; on en graiffe avec une plume fine les glandes de la gorge, après une ou deux faignées : cette onction, réitérée de deux heures en deux heures, avance la fuppuration, qui n'arrive fouvent que le neuvième jour, & guérit en trois jours une maladie des plus dangereufes.

Prenez égale quantité de feuilles de Jufquiame, de langue-de-chien & de nicotiane vertes, de chacune une livre; faites-les bouillir dans trois pintes de vin jufqu'à la réduction du tiers environ, en preffant bien les herbes : joignez à ce fuc autant de bonne huile d'olive; faites bouillir le tout fur un feu doux, jufqu'à ce qu'il foit réduit à la moitié, prenant garde que la poêle où on le fait ne fe noirciffe au fond, & ne brûle l'huile; verfez enfuite votre huile doucement dans une terrine on grattera ce que l'on pourra de ce qui fera refté au fond de la poêle, qu'on mêlera avec l'huile de la terrine, & on la laiffera refroidir enfuite. On verfera cette huile doucement & à clair dans des bouteilles; & ce qui fera refté au fond de plus épais, on en fera une espèce d'emplâtre, avec parties égales de cire jaune qu'on fera fondre fur le feu, en la mêlant exactement avec le marc de l'huile : on en formera enfuite une maffe d'emplâtre qui eft fort résolutif.

Cette huile n'eft pas feulement résolutive & trèsanodine; elle eft auffi vulnéraire, & très-utile dans les plaies & dans les ulcères : j'en ai vu de bons effets pour le rhumatifme & les douleurs de la fciatique. Celle qui eft tirée par expreffion des graines de Jufquiame, de mandragore, de morelle & de pavot, a les mêmes vertus.

On expofe les mains & les pieds affligés des engelures, à la fumée de la Jufquiame, après quoi on preffe les doigts, & on en fait fortir la lymphe épaiffie: ainfi cette plante eft anodine & réfolutive; elle entre dans l'onguent populeum.

Ses femences font employées dans le requies Myrepfi, dans le philonium romanum de Nicolas d'Alexandrie, dans la triphera magna du même, dans les pilules de cynogloffe de Méfué, & dans les trochisques d'alkékenge.

3. CIGUE.

1. Phellandrium Officin. Inft. R.H. 306; Boerh. ind. A. 56. Phellandrium vel Cicutaria aquatica quorumdam, I. B. t. iij. p. 183. Phellandrium Raii Synopf. iij. 215. Cicutaria paluftris Ger. 905; Raii Hift. 45. tenuifolia Park. Theat. 933; C. B. Pin. 161. [CIGUE AQUATIQUE.]

2. Cicuta major C. B. 160. Cicuta Dod. 461; I. B. t. iij. part. ij. pag. 175. Cicutaria vulgaris Cluf. Hift. 200; Trag. 474. [GRANDE CIGUE.]

3. Cicuta minor, Petrofelino fimilis, C. B. 160. Cicutaria Apii folio I. B. tom. iij. part. ij. pag. 179. Cicutaria fatua Lob. ic. 280. Petrofelini vicium Trag. 459. [PETITE CIGUE.]

La Cigue eft regardée comme un poison; mais les trois efpèces que nous venons d'indiquer ne le font pas au même degré. La Ciguë aquatique, nommée Phellandrium, l'eft infiniment plus que les deux autres; & je ne crois pas que jamais on hafarde d'en donner intérieurement. Les deux dernières espèces ont beaucoup plus de force lorfqu'elles font dans leur degré de maturité, que lorfqu'elles font encore jeunes. Leur odeur pénétrante, portant au cœur & à la tête tout à-la-fois, avertit affez qu'il ne faut pas les confondre avec la grande efpèce de cerfeuil & le perfil, avec lefquels elles ont quelque reffemblance; les animaux mêmes font avertis de s'en éloigner par leur instinct, qui n'eft prefque que l'odorat très-fin & très-fubtil.

Ce n'eft pas néanmoins d'aujourd'hui que quelques auteurs ont propofé intérieurement l'ufage de la grande Ciguë. Outre Pline, Galien & Van-Helmont, M. Renéaume, médecin de Blois, qui vivoit à la fin du dernier fiècle, & qui avoit fait fon étude particulière des vertus des plantes, affure,

dans fes Obfervations, qu'on peut ufer intérieurement de la racine de Ciguë pour réfoudre les skir rhes du foie, de la rate & du pancréas, à la dose d'un fcrupule, & même plus, foit en substance, soit en infufion. M. Storck, médecin & célèbre praticien de Vienne en Autriche, vient de donner au public un Recueil d'obfervations habilement faites fur l'ufage de la Ciguë, prife intérieurement en extrait & en fubftance. Frédéric Hoffmann, dans la Pharmacopée de Schroder, avoit déja confeillé l'uTage de la racine de Cigue pour le fcorbut. En effet, le fcorbut dépend fouvent d'obftructions dans les vifcères du bas-ventre, tels que le foie, la rate & le pancréas.

La Ciguë ne peut donc plus être regardée comme un poifon froid, mais comme un remède cor. dial, atténuant, réfolutif. Il ne conviendroit pas dans les obftructions, s'il n'augmentoit pas la circulation du fang, s'il n'en procuroit pas davantage la fluidité, s'il n'en déterminoit pas une fonte plus grande dans les couloirs où il étoit en concrétion.

On doit conclure de ces différentes obfervations, que nous ne fommes pas encore parfaitement inf truits fur la nature des différens calmans & narcotiques, & qu'on ne peut ni les confondre ni les fubftituer les uns aux autres : mais il est du moins certain par l'expérience, que la grande Ciguë, telle qu'on la trouve communément dans les terres graffes & humides, eft un des meilleurs remèdes dont on puiffe user extérieurement & même intérieurement (fi l'on en croit M. Storck) comme calmant, & comme réfolutif dans les skirrhes, les loupes, &c.

Elle entre dans l'emplâtre diabotanum, excellent réfolutif: elle a donné le nom à l'emplâtre de Cigue, qui eft un bon fondant pour les tumeurs du foie, de la rate & du méfentère. Je l'ai fouvent appliqué

appliqué avec fuccès fur la région épigaftrique pour des lenteurs dans la digeftion, pour des maux d'eftomac, pour la maladie qu'on appelle le fer chaud; & je le faifois renouveler au moins tous les huit jours. D'après les obfervations de M. Storck, on peut fe fervir avec confiance de l'extrait de Ciguë dans plufieurs maladies chroniques fi rebelles à toute efpèce de traitement.

Les feuilles de Ciguë, fur-tout de la deuxième espèce appelée Cicuta major, amorties & échauffées, s'appliquent fur la rate & fur les autres parties gonflées. On les fait bouillir avec le lait, pour mettre fur les hémorroïdes externes & enflammées. Pour les duretés du fein, celles même qui font foupçonnées d'être carcinomateufes, on applique avec fuccès les feuilles de Ciguë pilées avec l'urine ou l'huile de capres. Un cataplafme de feuilles de Ciguë pilées avec quelques limaçons, & mêlées avec les quatre farines réfolutives, eft bon dans l'engorgement inflammatoire du fcrotum, pour la goutte & la fciatique.

Je ne puis finir l'article de la Ciguë, fans parler de la mort de Socrate, qu'on croit devoir lui attribuer. Platon, qui eft entré dans un affez grand détail fur la fin tragique de ce grand philofophe, dit qu'après le breuvage pris, il fentit de la pefanteur aux cuiffes, fe coucha, fut faifi de froid & d'infenfi→ bilité, qui bientôt le gagna au coeur; on le couvrit, & Criton lui ferma les yeux. Il y a bien de l'apparence que ce n'étoit ni la Ciguë ni l'opium mais un breuvage compofé dont nous ignorons les ingrédiens. Ce qu'il y a de fingulier, c'eft que celui qui lui avoit apporté ce poifon, l'avoit averti que lorfqu'il agiroit il fentiroit une forte douleur aux cuiffes; qu'alors il falloit fe promener, que peu après l'infenfibilité du corps viendroit & lui annonceroit fa fin.

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