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trent; vérité confirmée par les analyses faites par M. Homberg, fur les mêmes Plantes femées dans deux caiffes différentes, remplies de terre deffalée par une forte leffive, & arrofées enfuite, l'une avec l'eau commune, & l'autre avec une diffolution de nitre dans l'eau fimple: ces Plantes rendirent cependant à peu près les mêmes principes.

L'abbé Rouffeau, Chimifte moderne, a fait beaucoup valoir les analyfes fermentées par l'addition du miel; & le livre des fecrets que fon frère a donné au public après fa mort, nous apprend quelques préparations affez utiles, fur-tout celle de l'opium je me fuis fervi de fa méthode, en travaillant fur les Plantes amères, pour effayer fi l'on pourroit corriger leur amertume fans altérer leur qualité. L'Hiftoire de l'Académie (1) fait mention de l'Eupatoire d'Avicenne, dont j'ai donné une analyfe fermentée avec le miel. J'en ai fait d'autres fur des Plantes amères odorantes, ou fans odeur comme la Gentiane, la petite Centaurée, l'Abfinthe, la Tanaifie, le Marrube blanc & quelques autres : j'ai diftillé ces Plantes au feu de fable, après les avoir laiffées en digeftion dans l'hydromel fimple, jufqu'à ce qu'elles commençaffent à fermenter fenfiblement; j'en ai tiré d'abord une liqueur fpiritueufe d'une odeur plus douce que la Plante ne l'avoit auparavant; la liqueur en étoit devenue vineufe & moins amère; à cette liqueur fpiritueufe a fuccédé un phlegme infipide & fans odeur, que j'ai rejeté comme inutile: le reste de la matière, filtré & évaporé, m'a donné un extrait qui contenoit le fel fixe & quelque portion de foufre groffier, enveloppé dans la partie terreufe de la plante ayant verfé fur cet extrait la liqueur fpiritueufe des premières diftillations, elle s'eft chargée

(1) Année 1705.

en peu de temps d'une teinture affez forte: cette teinture effentielle renfermoit par ce procédé les principes les plus agiffans de la plante, & deux ou trois onces d'une telle préparation contenoient la vertu de plufieurs livres d'une décoction amère & dégoûtante. Mais comme la fermentation défunit les parties & forme de nouveaux composés, & que d'ailleurs l'acide du miel peut altérer la qualité des mixtes, je n'ai pas reconnu que ces espèces de quinteffences euffent la même vertu que la Plante donnée en décoction ou en fubftance. Il vaut fouvent mieux employer les plantes amères, comme la nature nous les préfente, d'autant que ce qui nous rebute le plus, eft peut-être ce qui conftitue leur qualité la plus efficace, puifqu'en effayant par cette méthode de dépouiller, par exemple, l'Eupatoire de fon amertume, on affoiblit en même temps fa vertu.

Toute l'utilité de ces fortes d'analyses fermentées avec le miel, m'a paru confifter en ce qu'elles nous procurent les principes falins & fulfureux des végétaux, dégagés de la partie terreufe qui les enveloppe ordinairement; ces principes actifs réunis ensemble, & corrigés l'un par l'autre dans la fermentation, étant diffsous dans une quantité fuffifante de phlegme, peuvent fe diftribuer plus promptement dans les vaiffeaux fanguins, fans fubir les digeftions & les altérations qui fe font dans les premières voies; ainfi les Plantes aromatiques, & celles dont l'odeur eft forte & pénétrante, lefquelles abondent en fel volatil aromatique huileux, peuvent devenir par cette préparation plus propres à être portées jufque dans le fang, fans exciter par leur amertume & leur âcreté des fecouffes trop vives dans les fibres nerveufes de la gorge & de l'eftomac, fur lefquelles les remèdes font leur première impreffion; ces irritations vio

lentes n'étant utiles & néceffaires que dans les maladies extrêmes, dans lefquelles on a befoin d'un fecours prompt & efficace.

Tout bien examiné, on peut avancer qu'entre les médicamens tirés des Plantes, les plus fimples & les plus naturels doivent être préférés aux plus recherchés & aux plus compofés, à moins que l'excellence de ceux-ci n'ait été confirmée par un trèsgrand nombre d'expériences. La nature n'a-t-elle pas réglé plus fagement que nous, la dofe des principes dans chaque mixte? La terre & l'eau, que les Chimiftes rejettent fouvent comme inutiles, font quelquefois plus capables de produire les bons effets que nous remarquons dans les plantes, en modérant l'activité des foufres trop volatils, & en adouciffant l'âcreté des fels, que ces mélanges raffinés de quinteffences, d'efprits, d'huiles éthérées, d'élixirs & d'extraits, qui deviennent des poifons dans la main des ignorans qui ne favent pas les employer avec mefure & avec méthode.

On peut raisonnablement avancer que les faveurs & les odeurs font capables de nous conduire plus loin que l'analyfe, dans la découverte des facultés des Plantes. Les amères, par exemple, feront plutôt foupçonnées propres à rétablir les fonctions de l'eftomac & à faire mourir les vers, que les infipides; on pourroit employer plus hardiment dans les vapeurs hystériques & les affections foporeuses, une Plante dont l'odeur eft pénétrante & aromatique, & la faveur âcre, qu'une autre qui n'auroit nulle odeur & nulle faveur fenfible. Mais qui nous affurera que ces herbes amères & infipides, odorantes ou fans odeur, âcres ou douces, n'ont aucune qualité contraire aux maladies auxquelles nous les croyons propres, fi ce n'eft l'expérience, laquelle n'eft autre chofe qu'un acte réitéré plufieurs fois & prefque toujours uniforme? Cette

expérience doit fouvent fon origine au hafard, à l'exemple des animaux guidés par le feul instinct, à la couleur, à la figure extérieure, & à plufieurs autres circonftances, auffi bien qu'aux faveurs, aux odeurs & aux autres qualités fenfibles.

Après tout, les propriétés des Plantes, quoique bien établies par l'expérience, font toujours relatives à la difpofition de nos humeurs & à la conftitution de nos vifcères; l'altération des parties folides, ou la dépravation des liqueurs qui les arrofent, mettent fouvent les malades hors d'état d'être guéris par les plus affurés fpécifiques : la diverfité des tempéramens, la nature de la maladie, l'âge, la faifon, la différente température de l'air, la qualité des alimens dont les malades ont été nourris, leur régime de vie, leurs mœurs, & plufieurs autres circonftances, demandent une attention particulière; & pour être fûr de l'heureufe application d'un remède, quoiqu'il foit très-fimple & reconnu pour fpécifique, il eft néceffaire que la perfonne qui l'ordonne foit auffi prudente qu'exercée dans la profeffion de la Médecine. Tout le monde fent cette vérité cependant avec quelle facilité, pour ne pas dire avec quelle imprudence, ne confie-t-on pas fa fanté & n'abandonne-t-on pas fa vie entre les mains des ignorans, dont toute la capacité n'est fondée que fur beaucoup d'effronterie autorifée par quelque cure faite au hafard, ou fur des relations fufpectes & mendiées ? Le meilleur moyen de détromper le public prévenu en faveur des Charlatans dont il eft la dupe, feroit, à mon avis, de fe perfectionner dans la matière médicinale, & d'avoir à la main, outre les remèdes généraux qui font les armes ordinaires de la Médecine, plufieurs autres remèdes tirés du fein de la nature, qu'on fût placer à propos pour fe concilier la confiance des malades, en les foulageant dans leurs maux lorsqu'il

n'eft pas poffible de les guérir abfolument. Les plantes fourniffent abondamment ces fecouts, dont un Médecin ne peut fe paffer, s'il veut remplir dignement les devoirs de fon ministère.

Finiffons ce Difcours, en faifant remarquer que cet ouvrage ne fera pas feulement néceffaire à l'étude de la Médecine & à l'Hiftoire Naturelle; ceux auffi qui, plus attentifs à leur fanté que les autres, & fondés fur quelque légère expérience, fe croient en état de fe fuffire à eux-mêmes dans leurs infirmités, en deviendront plus capables, en connoiffant les Plantes dont ils apprendront ici les ufages; mais qu'ils fe fouviennent auffi de ne pas tant préfumer de leurs lumières, & d'appeler dans leurs maladies un Médecin auffi fage qu'éclairé, qui les guide dans la jufte application des remèdes, dans laquelle confifte principalement l'art de guérir.

A l'égard des favans & des bons praticiens, je les prie de regarder cet Abrégé comme l'ébauche & l'effai d'un plus grand ouvrage, que je ne dois entreprendte qu'après avoir été éclairé de leurs lumières, & plus inftruit par leur fréquentation & leurs expériences: j'efpère que l'utilité publique les engagera de m'accorder leurs avis & leurs réflexions pour une exécution plus parfaite de mon projet. Quoi qu'il arrive, je m'eftimerai toujours heureux, fi les jeunes Médecins trouvent dans mes démonftrations plus de facilité à connoître les plantes, & fi les malades rencontrent par leurs fecours, un plus grand nombre de remèdes auffi fûrs dans leurs opérations, qu'ils font commodes & à peu de frais.

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