tenoit d'un Confident du Prince d'Orange qui avoit été prefent. Aprés ce cruel reproche, & fi public, Guillaume n'eût garde de conduire le Roi dans fon Vaiffeau, & fe contenta de lui fouhaiter un heureux voyage au Port,étant en feureté dans la Ville, où il étoit chérement aimé, & où il y avoit un grand concours de peuple pour voir l'embarquement du Roi. Le Prince fut encore plus convaincu de fa disgrace, lors qu'au lieu d'avoir le Gouvernement des Païs-Bas, que fes Prédécefleurs avoient poffedé, qu'il fouhaitoit paffionnément, & à quoi il bornoit toute fon ambition, il vit au contraire, que le Cardinal de Granvelle fon ennemi avoit tout le fecret de la Cour d'Espagne fous Marguerite d'Autriche Ducheffe de Parme, qui fut établie Gouvernante, avec ordre de l'obferver, & de ne lui communiquer aucune affaire importante: ce qui le fit réfoudre, pour conferver fon honneur, & fa vie même, qu'il voyoit affez ouvertement menacée, de s'appuyer de la bien-veillance des Peuples, & de rechercher des Alliances étrangères. lui-même Sur ce fujet, on peut dire avec Philippes raifon que le Roi Philippes fecond, Jecond fut par le mauvais traitement qu'il fit à ce Prince qui avoit fi bien fervi de la perte la caufe l'Empereur fon pere, excita lui- des Paismême tous les defordres des Païs- Bas. Bas: car s'il eût continué de traiter favorablement le Prince Guillaume, fuivant le confeil & l'exemple de Charles-Quint, il l'auroit fans doute fervi fidélement & utilement: mais Guillaume fe vit forcé de prendre des réfolutions extrêmes, d'allumer un feu qui a duré plus de cent ans, qui a confommé plufieurs millions d'hommes, & qui a épuifé les trefors des Indes. Cela fait voir qu'il ne faut jamais Il ne faut jetter dans le defefpoir les grandsjamais courages: l'Hiftoire nous en fournit pouffer à bout les plufieurs exemples, entr'autres dans grands la perfonne de Narfés. Cet Eunu-cœurs: ce que renommé qui a égalé la gloire qui elt prouvé des plus grands Capitaines, ayant par l'evû fes fervices fignalez, payez non xemple de feulement d'ingratitude, mais de Narfés. mépris: l'Impératrice Sophie Femme de Juftin fecond, lui ayant mandé qu'elle le feroit filer avec fes fem mes, il lui répondit qu'il lui ourdiroit une toille, qu'elle & tout l'Empire ne pourroit jamais couvrir ; & afin que la menace ne fût pas vaine, il fit defcendre les Lombards en Italie, qui en conquirent la meilleure & principale partie, à laquelle ils ont laiffé leur nom; Aprés cela, fans retourner à Conftantinople, il s'arrêta à Naples, où ayant été quelque temps, il mourut doucement dans fon lit, malgré les embûches de cette fuperbe Impératrice, qui avoit envoyé Longin pour lui fuccéder, homme méchant & cruel, avec ordre de s'en défaire. Mais avant que de parler des actions du Prince d'Orange en général, il eft à propos de dire quelque chofe de fon Extraction, laiffant le long & importun détail aux Généalogiftes. La Maiffon de Naffau eft fans contredit une des plus grandes, & des plus anciennes d'Allemagne; car outre fes hautes Alliances, la multiplicité de fes branches, & l'honneur d'avoir donné un Empereur il y a prés de quatre cens ans, elle a encore ee grand avantage d'avoir fubfifté Lipfius. Un Comte Otho de Naffau, qui Othe étoit il y a fix cens ans, eût deux Comte de Femmes; la premiére lui porta en Nassau, Mariage le païs de Gueldre, & l'au- 600.45 épousa il y tre de Zutphen, qui ont été confer- l'héritiere vez plus de trois Siécles dans la Mai- de Guelfon de Naffau. a dres de Zut Depuis, un autre Comte Otho phen. de Naffau, époufa la Comteffe de Un autre Vianden Dame de plufieurs au- Otho tres terres confidérables dans les épousa la Conteffe Païs-Bas, il y a plus de trois cens de Vian ans. , den. de Breda. En fuite, fon petit Fils Engilbert Engilbert premier de ce nom, Comte de Naf- 1. époufa fau, époufa l'héritière de Loke, & l'héritière de Breda, l'an 1404. & fut Aycul d'Engilbert de Naffau fecond de ce Engilbert nom. Ce Prince fut grand en paix, II.deNaf & en guerre. Il gagna la bataille de fau, fut Guinegafte: il punit la rebellion de neur géné ceux de Bruges, & fut Gouverneur ral des Gouver Pais-Bas général des Païs-Bas pour l'Empe pour reur Maximilien premier. En fuite l'Empe il mourut fans Enfans, & laiffa fon ximilien. Frere Jean de Naflau héritier de tous fes biens. reur Ma Henri Ce Comte Jean eût deux Fils, Comte de Henri, & Guillaume: l'aîné Henri Nassau par fes eût tous les biens des Païs-Bas en brigues, partage, & Guillaume ceux d'Allefait Char- magne. C'eft cet Henri de Naffau, les-Quint à qui Charles-Quint avoit obliga Empe TEHT. tion de l'Empire par fes fortes follicitations contre le grand Roi François ; & qui, le jour de fon Couronnement, lui mit la Couronne Impériale fur la tête. Cependant, aprés que la Paix fut faite entre ces deux grands Princes, & que l'Empereur l'envoya en France pour faire hommage des Comtez de Flandres, & d'Artois, le Roi François, oubliant le paffé par une générofité incroyable, lui fit époufer Claude de Châlon fœur unique de Philebert de Châlon Prince d'Orange, laquelle avoit été nourrie auprés de la Reine Anne de Bretagne fa belle-mere; ainfi fon fils unique René de Naffau & de Châlon fut Prince d'Orange |