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CHAPITRE X VII.

Des Congregations des Filles de la Croix.

'AN 1625. un Maître d'Ecole de la ville de Roye en Picardie, aïant attenté à la pudicité d'une de fes Ecolieres, les plaintes en furent portées au Doïen du Chapitre de cette ville, qui étant auffi Grand- Vicaire du Diocêfe d'Amiens, fit un châtiment exemplaire de cet attentat, & s'empreffa de chercher les moïens de remedier à un tel abus; ce qu'il n'eut pas beaucoup de peine à trouver : car quatre filles vertueufes qui travailloient en couture s'étant offertes pour inftruire les jeunes perfonnes de leur fexe, on leur en confia le foin ; & ces quatre filles formerent alors entre elles une petite Communauté, fous la direction de M. Guerin, l'un des Curés de cette ville, qui leur prefcrivit des Reglemens. Mais à peine fix femaines s'écoulerent, que le Demon jaloux des grands biens qu'elles faifoient par la bonne éducation qu'elles donnoient aux jeunes filles, leur fufcita & à leur Directeur des perfecutions qui durerent jufqu'en l'an 1636. que les guerres & leurs propres affaires les obligerent d'abandonner la ville de Roye,& de fe refugier à Paris,où le Pere Lingendes Jesuite les adreffa à Madame de Villeneuve, Marie Luilier, veuve de M. Claude Marcel, Seigneur de Villeneuve le Roi, & Maître des Requêtes ordinaire de l'Hôtel du Roi. Cette Dame, que faint François de Sales avoit follicitée plufieurs fois d'établir une Communauté de Filles Seculieres qui s'emploïaffent à l'instruction des perfonnes de leur fexe, regardant cette occafion comme favorable pour l'execution de ce deffein, reçut ces filles avec joïe, & les mit dans une Maifon à Brie-Comte Robert, éloignée de Paris de fix lieuës. Quelque tems après elle alla demeurer avec elles ; & pour donner moïen à ces filles d'exercer plus utilement la charité envers les perfonnes de leur fexe, en les inftruifant & les portant à la pieté, elle les envoïoit de tems en tems en divers lieux, où pendant le peu de fejour qu'elles y faifoient, elles s'emploïoient à cette inftruction avec beaucoup de fruit, obfervant toûjours les Reglemens qui leur avoient été prefcrits par leur premier Directeur, que Ma

FILLES DE LA CROIX.

FILLES DE dame de Villeneuve fit venir à Paris, lui aïant procuré par
LA CROII. le moïen du Commandeur de Sillery, Noël Brulard, une

penfion pour fon entretien. Mais ce Directeur & Madame
de Villeneuve ne s'accorderent pas long tems ensemble: car
cette Dame voulut introduire beaucoup de nouveautés
parmi les filles, & le Directeur ne voulut rien changer dans
les Reglemens qu'il avoit d'abord prefcrits, n'approuvant
point fur tout les voeux, aufquels Madame de Villeneuve
vouloit engager ces filles, & qu'elle voulut faire elle même
pour donner exemple aux autres. Le nombre de ces filles
augmentant de jour en jour, cette Dame obtint l'an 1640.
de Jean François de Gondy Archevêque de Paris,l'érection
de cette Compagnie de Filles en Societé ou Congregation,
fous le titre des Filles de la Croix, & qui fut autoritée par
Lettres Patentes du Roi verifiées au Parlement de Paris l'an
1642. Ce fut pour
lors que
Madame de Villeneuve fit avec
Les filles qui demeuroient avec elle à Vaugirard, les vœux
fimples de chafteté, pauvreté, obéiffance & ftabilité, entre
les mains de Monfieur Froger, Curé de faint Nicolas du
Chardonnet, qui leur fut donné pour Superieur par l'Ar-
chevêque de Paris. Cette Dame voïant la Congregation
formée, voulut lui procurer un établiffement dans Paris, cù
étant venuë la même année, elle pria la Mere Angelique
Luillier, Fondatrice & premicre Supericure du premier
Monaftere des Filles de la Vifitation, de recevoir au Novi-
ciat dans fon Monaftere deux des quatre premieres filles,qui
avoient commencé l'Inftitut des Filles de la Croix, pour
prendre mieux l'efprit de cet Inftitut, & fe former dans la
pratique des Obfervances Regulieres. Elle acheta l'Hôtel
des Tournelles dans la rue faint Antoine, au cul de fac de
l'Hôtel de Guimenée, où les Filles de la Croix ont toûjours
demeuré jufqu'à prefent ; & cette Maifon en a produit plu
fieurs autres. Cette acquifition caufa de nouvelles broüille-
ries entre Monfieur Guerin, le premier Directeur, & Ma-
dame de Villeneuve, à caufe qu'elle l'avoit faite fans fa
participation ; & que fans fon confentement elle avoit obligé
quelques unes des filles à faire des vocux: ce qui fut caufe
que les filles qui demeuroient à Brie Comte- Robert,& celles
de Paris fe féparerent, & formerent comme deux Congre-
gations differentes : les premieres demeurant dans leur pre-

miere fimplicité,& ne voulant point s'engager par des vœux, FILLES DE s'attacherent toûjours à Monfieur Guerin, & fuivirent fes LA CROLL. Reglemens, & les autres obéirent à Madame de Villeneuve, & fe foûmirent aux changemens qu'elle avoit introduits dans l'Institut, par l'avis & le confeil de plufieurs grands Serviteurs de Dieu, & entr'autres,de Monfieur Vincent de Paul, Inftituteur de la Congregation des Prêtres de la Mission, qu'elle confultoit en toutes chofes, & qui rendit de grands fervices à la Congregation des Filles de la Croix: car après la mort de Madame de Villeneuve, qui arriva le 15. Janvier 1650.les perfonnes qui s'étoient le plus interreffées pour cette Congregation, étant d'avis qu'on la fupprimât, à caufe de la difficulté qu'il y avoit de pourvoir à sa subsistance, & de quelques fâcheux accidens qui lui arriverent dans le même tems; il fut quafi le feul qui s'y oppofa dans plufieurs Affemblées que l'on tint fur ce fujet, foûtenant toûjours qu'il falloit au contraire pour le bien public chercher tous les moïens poffibles pour la foutenir & la faire fubfifter. C'est pourquoi il confeilla à une vertueuse Dame, dont il connoiffoit le zele & la charité, d'entreprendre cette bonne œuvre, & de fe rendre Protectrice de ces bonnes Filles. Ce fut Madame de Traversay, Anne Petau, veuve de Monfieur Renaud Seigneur de Traverfay,Confeiller au Parlement de Paris, laquelle déferant à l'avis de Monfieur de Paul, s'emploïa avec tant de zele pour foûtenir & défendre les interêts de cette Congregation, qu'elle furmonta tous les obstacles qui fembloient les plus difficiles, & la mit en état de fubfifter & de rendre comme elle fait un fervice utile à l'Eglife.

Dès l'an 1644. Madame de Villeneuve avoit procuré aux Filles de la Croix qui faifoient des voeux, & demeuroient à l'Hôtel des Tournelles à Paris, un fecond établiffement à Ruel, à deux lieuës de Paris, où elles furent mises par la Ducheffe d'Aiguillon, niéce du Cardinal de Richelieu, qu'elles reconnoiffent pour une de leurs principale; Bienfac trices, aïant contribué par fes liberalités à l'achat de l'Hôtel des Tournelles, les aïant établies dans la ville d'Aiguillon, & leur aïant procuré d'autres biens fort confiderables. Celles qui ne faifoient point de vœux, & qui demeuroient à Brie Comte Robert,eurent auffi à peu près au même tems un établiffement à Paris dans la Paroiffe de S. Gervais,& en ont Tome VIII.

R

LA CROIX.

FILLES DE fait d'autres dans la fuite en plufieurs villes du Roïaume comme à Roye, à Rouen, & à Barbefieux, où elles ont des Maifons, qui font toutes unies enfemble fous la direction. d'un même Superieur, qui les conduit felon les premiers Reglemens qui furent prefcrits par Monfieur Guerin. Les autres filles qui font des voeux, ont des Reglemens particu liers, qui leur furent donnés par M. l'Evêque de Rhodez Louis Abelly, pour lors leur Superieur ; & leurs principales Maifons, outre celles de l'Hôtel des Tournelles à Paris, font celles de Ruel, de Moulins en Bourbonnois, de Narbonne, Treguier, Aiguillon, faint Brieu, faint Flour, & Limoges; fans compter plufieurs Hofpices qui dépendent de quelques-unes de ces Maifons, comme celui du fauxbourg faint Marcel à Paris, qui dépend de la Maison de l'Hôtel des Tournelles, Mont Luçon & Aivaux, qui dépendent de Moulins. Elles ont auffi paffé dans le Canada, où elles ont à Quebek une Communauté de plus de cent Filles,avec une Eglife ouverte, au lieu que dans les autres Maifons elles n'ont que des Chapelles domeftiques. Monfieur de Harlay de Chanvalon Archevêque de Paris, permit l'an 1689. à celles de l'Hôtel des Tournelles d'avoir le faint Sacrement dans leur Chapelle ; mais celles qui demeurent dans la Paroiffe de faint Gervais, n'ont ni Eglife ni Chapelle domestique, & vont à la Paroiffe entendre la Meffe & l'Office divin. Le Cardinal de Vendôme étant Legat à Latere du Pape Clement IX. en France, confirma cette Congregation ; & la Bulle qui fut adreffée aux Maifons de Paris & de Ruel en 1668.s'exprime d'une maniere fort honorable & avantageuse pour cet Inftitut.

Les Filles de cette Congregation, tant celles qui font des vœux que celles qui n'en font point, s'exercent à toutes fortes d'oeuvres de charité fpirituelle qui leur font convenables à l'égard des perfonnes de leur fexe, & principalement envers les pauvres, tenant leurs Maisons ouvertes pour les y recevoir, foit pour les inftruire des chofes neceffaires à leur falut, foit pour les difpofer à faire de bonnes confeffions générales ; & même des retraites de quelques jours, felon les befoins qu'elles peuvent avoir. Celles qui font des vœux recitent en commun le petit Office de la Vierge, font auffi en commun foir & matin l'oraison mentale, ont les heures de

SAINT › SULPICE,

filence, & jeûnent tous les Vendredis, & les veilles de quel- SEMINAIRES ques Fêtes. Les unes & les autres font habillées de noir, DE comme les Filles Seculieres. Elles ont un mouchoir de cou en biais. Celles qui font des vœux portent une petite croix d'argent, & les autres une petite croix de bois.

Memoires donnés Tournelles à Paris, &

les Filles de la Croix de l'Hôtel des
les Filles de la Croix de la Paroiffe

par
par

de faint Gervais. L'on peut confulter auffi la Vie de Monfieur Vincent de Paul, par Monfieur Loüis Abelly, Evêque de Rhodez.

CHAPITRE XVIII.

Des Seminaires de faint Sulpice, fondés par Monfieur
Olier, Curé de faint Sulpice à Paris, avec la Vie de ce

Fondateur.

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ONSIEUR Olier l'un de ces hommes Apoftoliques que Dieu fufcita dans le dernier fiécle pour travailler à la Réforme du Clergé, nâquit à Paris le 20. Septembre 1608. & fut le fecond de trois enfans mâles dont la divine providence benit le mariage de Monfieur Olier Maître des Requêtes ordinaire de l'Hôtel du Roi, & de Marie Dolu fon épouse. Aïant été baptisé fur les Fonts de la Paroiffe de faint Paul, où il reçut le nom des Apôtres faint Jean & faint Jacques,il fut porté peu de tems après au fauxbourg faint Germain pour y être nourri, Dieu voulant qu'il paffat les premieres années de fa vie, où il devoit finir fes jours, & que la Paroiffe de faint Sulpice au bien de laquelle il devoit confacrer fes plus grands travaux, fût le lieu de fa premiere éducation On remarqua dès fes premieres années que fes cris ne pouvoient être appaifés par les amusemens ordinaires des enfans & que pour arrêter fes larmes & le mettre en repos, il le falloit porter à la Paroiffe, où fi tôt qu'il étoit entré il étoit tranquille & paifible. Après qu'il eut paffé les premieres années de l'enfance, & qu'on lui eut appris les premiers élemens de la Langue Latine, on l'envoïa au College, où il fit de fi grands progrès dans l'étude, que parens le deftinerent à l'état Ecclefiaftique & le firens

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