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vous douter qu'elle ne foit encore plus à plaindre que vous? Jude fa douleur ; il eft des momens où elle eft fans nul espoir de jamais unir fon fort au vôtre; après avoir été quelquefois plongée dans une profonde rêverie elle s'écrie: Ah! cher Comte, je ne ferai donc jamais à vous! Votre pere eft irrité contre moi; ma réfiftance, quoique jufte, l'a offense; il s'en vangera; j'en ferai la victime. Ouii, ma chere amie, me dit-elle toute en pleurs, Thibault de Rethel, malgré la parole qu'il vous a donnée, difpofera de ce fils refpectueux... Peutelle le penser, m'écriai-je ! Peutelle croire que je renonce jamais à elle! Mon pere le voudroit en vain! Mademoiselle de Rofoi, me repliqua-t'elle, ne peut comprendre qu'on ofe s'opposer à la volonté de ceux qui nous ont

donné

donné le jour. Mais, Comte, ajouta-t'elle, il faut que Madame de Rofoi tombe elle-même dans l'erreur où elle veut jetter fa fille; il faut que le fuccès qu'elle en attend, tourne contre elle: oui; il faut qu'elle vous croïe hors des chaînes de Mademoiselle de Rofoi, & de plus, engagé dans de nouvelles. Cherchez à la Cour ce qui feroit le plus digne de vous, fi vous étiez libre d'y faire un choix, & paroiffez vous y attacher. Mademoifelle de Rofoi a d'abord montré une forte répugnance pour ce ftratagême; elle en a fenti tout le danger. Quelle injufte & obligeante crainte, m'écriai-je! Hé bien! cherchons un autre moïen! Non, reprit Mademoiselle de Rocheville; la timide & tendre Alix eft raffurée, elle compte fur votre conftance: ce n'eft pas

Tome I.

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tout, voiez quelquefois Madame de Rofoi, mais fans empreffement; furtout, paroiffez tranquile au fujet de fa fille ; défendez-vous mal, fi elle vous montre des foupçons ; fi elle vous preffe, convenez avec un air embaraffé de votre changement. Je ne tarderai pas à être inftruite de l'effet que produira votre stratagême; alors nous prendrons de nouvelles mefures. Allez, mon cher Comte, retournez à Paris, & ne vous montrez jamais ici, que je ne vous envoie chercher. Ma fœur, qui m'a confié la clef de cette porte, par où je fuis fortie, m'a donné la facilité de vous voir; mais je lui fais courir trop de rifque, & j'en cours trop moimême, pour en abufer. Quoi! lui dis-je, je ne verrai point Mademoiselle de Rofoi? Non, me répondit-elle ; elle eft observée

de trop près par les ordres de l'Abbeffe, attentive à exécuter exactement ceux de Madame de Rofoi. Et vous, lui dis-je vivement, exécutez ce qu'une jufte crainte de l'avenir, ce que la pitié, la prudence & l'amitié doivent vous montrer néceffaire. Tremblez d'avoir à vous reprocher un jour des malheurs, aufquels il ne fera plus tems de donner des larmes : cette clef que vous tenez dans vos mains, pourroit les prévenir; fongez qu'elle peut fouftraire Alix aux perfecutions & aux cruautez de fa barbare mere, & me rendre heureux à jamais. Et vous, Comte, me repartit Mademoiselle de Rocheville, fongez-vous à ce que vous voudriez exiger de moi ? Quoi! je trahirois la confiance de ma fœur! Quoi ! j'expoferois, cette fille eftimable, à être, le

refte de fes jours, la trifte victime de ma perfidie! Non; ne l'efperez pas, quand même Mademoiselle de Rofoi confentiroit à fe prêter à un enlevement. Après. de vaines prieres, après avoir juré mille fois que j'adorois Alix, je quittai mon amie, & revins à Paris.

En arrivant, je trouvai une lettre de mon pere; il étoit au défefpoir de ce que Mademoiselle de Rocheville ne l'avoit pas averti du départ de Madame de Rofoi il fentoit, comme moi l'occafion favorable & perduë; il me donnoit les mêmes confeils que j'avois déja pris de moi-même, & que Chelles rendoit inutiles: il ajoutoit que je perdois beaucoup par l'abfence du Vicomte de Melun, frere de Madame de Rofoi ; qu'il fentoit combien fon fejour auprès de

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