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le ferment que vous aviez fait l'un & l'autre de vivre comme deux tourterelles, eft dans le defsein d'avoir au plutôt un appartement féparé du vôtre, & de ne vous voir que le plus rarement qu'il pourra?

:

DORIMENE.

Ah! ce n'est point lui qui a formé ce deffein ; je le connois, il a le cœur trop bien fait ; c'est ce fripon de Chevalier, qui l'empoifonne de ses conseils, & qui, malheureusement, est autorisé par l'usage du monde, cet usage dangereux, qui féduit les plus honnêtes gens.

LISET TE.

Mais, Madame, cet ufage fait auffi pour vous.

DORIMENE.

Tout mon reffentiment se tourne contre le Che

valier.

LISETTE.

Confolez-vous, vous allez être vengée; j'ai tout

difpofé pour cela.

DORIMEN E.

Et quelle eft cette vengeance?

LISET TE.

J'ai foulevé fecrettement toutes les femmes du quartier contre lui; je leur ai fait entendre qu'il

étoit notre ennemi déclaré, qu'il nous déchiroit continuellement par des médifances outrées, & qu'il témoignoit pupliquement le mépris qu'il avoit pour nous. En un mot, je l'ai peint à leurs yeux avec des couleurs fi noires, & elles font toutes fi irritées, qu'il verra beau jeu la premiere fois qu'il viendra ici. Mais! que veut Angelique, les larmes aux yeux?

SCENE

VI.

DORIMENE, ANGELIQUE, LISETtte.

AH!

ANGELIQUE.

! ma bonne fœur, j'ai recours à vous.

DORIMENE.

Qu'eft-ce, qu'avez-vous, Angelique ?

ANGELIQUE.

On vient de me dire que mon petit frere vouloit me donner à ce vieux Financier qui vint hier ici. J'ai bien de l'averfion pour le couvent, mais je l'aimerois encore mieux que ce barbon - là. Je mourrois s'il m'époufoit.

DORIMENE..

Remettez-vous, belle Angelique; je fçais le

moyen de l'empêcher.

ANGELIQUE. 1

Ah! vous me rendez contente. Je vous dirois bien autre chose, auffi bien cela me pese fur le cœur mais Lifette l'iroit redire.

LISETTE.

Ne craignez rien, je fuis difcrette.

ANGELIQUE.

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Jurez-moi que vous n'en parlerez pas.

LISET TE.

Foi d'honnête fille, je vous le promets.

ANGELIQUE.

Je ne me fie pas trop à tous ces fermens-là; mais je meurs d'envie de parler, je ne puis plus garder

le fecret.

DORIMENE.

Et quel eft ce grand secret?

ANGELIQUE.

J'ai fait une conquête.

DORIMENE.

Déjà?

ANGELIQUE.

Oui.

DORIMENE.

Et de qui ?

ANGELIQUE.

De Léandre.

DORIMENE.

Et comment le fçavez-vous?

ANGELIQUE.

Il me l'a dit lui-même, & il m'a juré qu'il m'aimoit de tout fon cœur, & qu'il feroit charmé d'être mon mari.

DORIMENE.

Et vous lui avez répondu ?

ANGELIQUE.

Je lui ai répondu que je l'aimois bien auffi, & que je ne ferois pas fâchée d'être fa femme.

DORIMENE.

Cela n'eft pas bien; une jeune fille doit cacher de pareils fentimens.

ANGELIQUE.

Voyez-vous, ma petite four? cela échappe malgré qu'on en ait.

LISET TE.

Mademoiselle Angelique, vous êtes bien avancée pour votre âge, & je crois que votre poupée n'est pas ce qui vous occupe le plus.

ANGELIQUE.

Parler de poupée à une grande fille comme moi, qui aura bien-tôt treize ans, cela eft impertinent. Me croyez-vous une Agnès ?

DORIMENE.

Allez, Lifette est une folle qui veut rire. Puifque Léandre vous plaît, & qu'il vous aime, je porterai votre frere à faire ce mariage.

ANGELIQUE, en s'en allant.

Que j'aurai d'obligation à ma bonne fœur !

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Il ne tiendra pas à moi qu'elle ne foit mariée au

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Je ne m'y connois pas, ou, dans quelques années d'ici, elle ne fera pas d'humeur à fouffrir que fon mari la trompe impunément.

DORIMENE.

Tant- pis, Lifette, tant - pis; de mon côté, je formerai fa jeunesse au bien, autant qu'il me fera poffible, & je fçaurai la détourner du mauvais air du monde.

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