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Par mon peu

de talent je n'ofe m'en fla ter,

Mais le defir de plaire et toujours un grand

maître.

Le théâtre repréfente le jardin de Lubin, Jardinier-Fleurifte.

L'Amour déguifé en jeune Payfan ou vre la fcène & expose l'usage où font les Payfans de ce hameau, de lui offrir leurs hommages par celui qu'ils en trouvent le plus digne. Il a réfolu de jouer lui-même ce rôle pour faire le bonheur de Colinette qui lui a paru mériter fes bienfaits.

Lucas, garçon Jardinier de Lubin, pere de cette Colinette, vient confulter l'Amour fans le connaître, & le prie de l'aider de fes avis pour le tirer de l'embarras où l'a mis l'Amour qu'il a pris pour Colinette, qu'il n'ofe demander en mariage parce qu'elle eft riche, & qu'il n'a rien. L'Amour lui donne l'exemple du parti qu'il doit prendre dans ce même jardin, qui appartient à Lubin & qui cependant eft cultivé par Lucas.

L'AMOUR.

Le Maître d'un Jardin, aimant l'oisiveté,
Jouit en parelleux de la propriété;

De travailler lui-même il ne prend pas la peine,

Ses Garçons en font tous les frais,

Et les maris...

LUCAS.

J'entends, font de même à peu près.

L'Amour ajoute que l'on n'épouse que ceux que l'on veut attraper. Lucas qui ne peut croire que Colinette foit capable de le tromper, dit qu'il en cour rait volontiers les rifques. L'Amour qui cherche à lui infpirer de la jaloufie, lui demande ce qu'il ferait fi l'on venait à en conter à fa femme; Lucas répond qu'il la renfermerait.

L'AMOUR.

Ce ferait une mal-adreffe ;

Colinette pour lors perdrait fon agrément;
Il ferait bientôt effacé par la trifteffe.
La beauté de bien près tient à l'amufement,
Je n'apporterai pour exemple,
Qu'un Oranger jeune & chargé de fleurs ;
Avec plaifir on le contemple,

Il parfume les airs de fes douces odeurs;
S'il eft trop renfermé, cette fleur tombe

terre;

Les feuilles perdent leurs couleurs;

L'arbre jaunit, deffeche & languit dans la

ferre;

Et bien loin d'en jouir, le trifte Possesseur
Honteux de fa méprife, & devenu docile,
Se donne bien fouvent une peine inutile
Pour rendre à l'Oranger la vie & la fraîcheur.
LUCAS.

Vous m'baillais de l'intelligence,
Eh bian! j'aurions la complaifance
Qu'on ne renfermât pas l'Oranger.

L'AMOUR.

Tu tomberais dans un autre danger.
Un tourbillon de vent peut-être
Un beau matin viendrait tout ravager;
C'eft l'image d'un Petit-Maître.

Tu le verrais avec douleur,
Arracher ce qu'un autre cueille ;
Il ôterait toute la fleur,

Et ne laifferait que la feuille.

Lucas qui n'eft que plus incertain, prie l'Amour de le laiffer ruminer à part; mais auffitôt qu'il eft feul, fa gaieté reprend le deffus, & il chante en faifant l'ouvrage de Colinette.

Morgué, ça va tout feul, j'en fis furpris moimême,

En travaillant pour moi, mon ratiau paraît lourd,

En travaillant pour ce que j'aime,
C'est une pleume de l'Amour.

Colinette arrive auffi en chantant; eHe eft agréablement furprise de trouver sa befogne faite, elle en remercie Lucas.

LUCAS.

Bon! bon! j'crois que vous vous moquais,
C'te b'fogn' la n'est que de la mifere;
Je ne fais pas à biaucoup près,
Toute ftella que je vourais.

COLINETTE.

Il en faut demander davantage à mon pere.

Cependant ils fe mettent à l'ouvrage, de peur que Lubin ne les gronde, mais ils font tous deux fort diftraits dans leur befogne; Lucas furtout ne fait comment s'y prendre pour parler de fon amour à Colinette, il prend l'occafion de deux branches amoureufes qu'elle allait couper, & pour lefquelles il demande grace.

Ne remarquais-vous pas qu'alles s'entrelaçons;

Voyais comme alles s'embraffons! C'eft fur l'inflinct que ma raison se fonde : Tout ce qui s'aime est nécessaire au monde, Il n'en faut retrancher que ce qui n'aime pas.

Lubin les furprend, & Lucas lui répond qu'il lui apprenait à tailler des Arbres. Lubin ordonne à sa fille de fuir Lucas, parce que ce garçon eft entiché d'amour. Colinette, comme de raifon, ne manque pas de demander ce que c'eft que l'amour, & Lubin lui répond que c'eft une bête douce les premiers jours,

All' flatte, all' fait la patte de v'lours;
Mais en d'ffous la griffe eft cachée.

Drès qu'alle voit que d'elle on n'a pus peur,
A vous faifir alle s'apprête,

Pis tout d'un coup all' vous prend à la tête, Pis all' le boute après au biau mitan du cœur ; Et pis quand cune fois alle s'eft là campée, Alle s'y tiant, alle eft là dans fon fort; L'on va, l'on viant, l'on crie, alle pince pus fort;

Et fi par la piquié queuqu' fillette attrapée, Approche de trop près un homme atteint de ç' fort,

Alle le gagne tout d'abord,

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