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SUR

NE

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L'ABANDON

à Dien.

E craignez rien, vous feriez une grande injure à Dieu, fi vous vous défiez de fa bonté. Il fçait bien mieux ce que vous pouvez, & ce que vous êtes capable de porter que vous-même. Encore un coup, ne craignez rien, ame de peu de foi. Vous voïez tous les jours par l'expérience de votre foiblesse, combien vous devez être défabufée de vous-même, & de vos meilleures réfolutions. A voir les fentimens où l'on eft quelquefois, on croiroit que rien ne feroit capable de nous ébranler; & après avoir dit avec faint Pierre: Quand Marc, XIV. même il me faudroit mourir cette nuit avec vous, je ne vous abandonnerai point. On fait comme lui.On a peur d'une fervante, & on renie lâchement le Sau

yeur.

autant

O qu'on eft foible ! Mais autant que notre mifere eft déplorable l'expérience nous en eft utile, pour nous ôter tout apui & reffource au-dedans de nous. Une mifere que nous fentons qui nous humilie, nous vaut bien

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mieux qu'une vertu angélique que nous nous aproprions avec complaifance. Soïez donc foible & découragé, fi Dieu le permet, mais humble, ingenu & docile dans le découragement. Confultez Dieu le premier fur votre état, il le connoît mieux que vous. Souvenezvous de ce que je vous dis, vous rirez un jour des fraïeurs que votre fageffe vous donne maintenant; & vous remercierez Dieu de tout ce que je vous ai dit, pour vous faire renoncer à votre fageffe timide.

Vous ne devez point vous embaraffer de vos défauts, pourvû que vous ne les aimiez pas, & qu'il n'y en ait aucun que vous aïez un fecret défir d'épargner. Il n'y a que les réferves qui arrêtent la grace, & qui font languir une ame fans avancer jamais vers Dieu. Si vous abandonnez toutes vos imperfections à l'esprit de Dieu, il les dévorera comme le feu dévore la paille; mais avant que de vous en délivrer, il s'en fervira pour vous délivrer de vous-même ; il les emploïera à vous humilier, à vous confondre, à vous crucifier, à vous arracher toute reffource & toute confiance en vous-même. Il brûlera les verges après vous en avoir

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frapé, pour vous faire mourir à l'amour propre. Courage, aimez, foufrez, foïez fouple & conftant fous la main de Dieu.

Nos prévoïances trop inquiétes fur l'avenir, ne fervent de rien. Ce n'est pas toujours par les endroits prévûs que Dieu nous prend ; la prévoïance adou

ciroit le coup; c'est des chofes que

par

nous n'aurions jamais cruës, & que nous aurions fouvent compté pour rien. Souvent celles dont nous nous faifons des fantômes, s'évanouiffent ; ainfi ces prévoïances ne font bonnes qu'à nous inquiéter.

Obéïffez chaque jour. L'obéiffance de chaque jour et le véritable pain quotidien. Nous fommes nourris comme JESUS-CHRIST, de la volonté de fon Pere, que la Providence nous aporte dans le moment préfent. Ce pain célefte eft comme la manne; on ne pouvoit en faire provifion. L'homme inquiet, & défiant qui en prenoit pour le lendemain, la voïoit auffi-tôt fe corrompre. Ploïez-vous à tout ce qu'on veut. Soïez fouple & petit fans raifonner, fans vous écouter vous-même; prêt à tout, & ne tenant à rien; haut & bas, aimé, haï, loüé, contredit,

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emploïé, inutile, aïant la confianċ e, l'envie ou le foupçon des gens avec qui vous vivez. Pourvû que vous n'aïez ni hauteur, ni fageffe propre ni fageffe propre fur aucu

nes chofes, tout ira bien. En voilà beaucoup, mais ce n'eft pas trop. Soïez en filence le plus que vous pourrez. Nourriffez votre cœur, & faites jeûner votre efprit.

Je vous fouhaite tous les biens que vous devez chercher dans la retraite ; le principal eft la paix dans une conduite fimple, où on ne regarde jamais l'avenir avec trop d'inquiétude. L'avenir eft à Dieu, & point à vous. Dieu l'affaifonnera comme il faut, felon vos befoins: mais fi vous voulez pénétrer cet avenir par votre propre fageffe, vous ne tirerez aucun fruit que l'inquiétude, & la prévoïance de certains maux inévitables. Songez feulement à profiter de chaque jour; chaque jour a fon bien & fon mal, en forte même que le mal devient fouvent un bien, pourvû qu'on laiffe faire Dieu, & qu'on ne le prévienne jamais par impatience.

Dieu vous donnera alors tout le tems qu'il faudra pour aller à lui. Il ne vous donnera peut-être pas tout celui vous voudriez pour vous ocuper felon

que

Votre

votre goût, & pour vivre à vous-même fous prétexte de perfection; mais vous ne manquerez ni de tems, ni d'ocafion de renoncer à vous-même, & à vos inclinations. Tout autre tems audelà de celui-là, eft perdu, quelque bien emploïé qu'il paroiffe. Soiez même perfuadé, que vous trouverez fur toutes ces chofes, des facilités convenables à vos vrais befoins: car autant que Dieu déconcertera vos inclinations, autant foutiendra-t-il votre foibleffe. Ne craignez rien, & laiffez - le faire. Evitez feulement par une ocupation douce, tranquille, & réglée, la trifteffe & l'ennui, qui font la plus dangereuse tentation pour votre naturel. Vous ferez toujours libre en Dieu, pourvû que vous ne vous imaginiez point d'avoir perdu votre liberté.

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DE LA

PRESENCE

de Dieu.

notre per-.

Lfection, et renferme dans cette
E principal reffort

parole que Dieu dit autrefois à Abra

ham: Marchez en ma préfence, & vous Genef. XVI.

ferez parfait.

S

I.

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