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humanité: fans elle, le médecin le plus habile ne remplit qu'imparfaitement fes obligations facrées. Il doit plaindre les maux qu'il entreprend de guérir; c'est la compaffion qui le conduira chez le pauvre dénué de fecours; c'est elle qui peut feule lui faire mettre en ufage toutes les reffources de fon art, & le préferver d'une coupable négligence, ou d'une décourageante dureté ; c'est ce tendre mouvement qui faura lui découvrir les moyens de confoler, de fortifier fes malades, & de ranimer l'espérance au fond d'un cœur abattu par la crainte, & flétri par la trifteffe!... Quelle profeffion fublime, lorfqu'elle eft dignement exercée!.. Eft-il un dévouement plus héroïque que celui de confacrer fes talens, fes veilles & fa vie à l'humanité fouffrante?... La charlatanerie, la pédanterie, & une ridicule préfomption n'ont que trop fouvent fait méprifer ce noble état; mais un médecin habile, compatiffant, & qui chérit tous fes devoirs, est fans doute l'objet le plus refpectable, & celui qui mérite le mieux la reconnoiffance & l'admiration de tous les hommes.

RENAU n.

Votre générosité m'a procuré les moyens

d'embraffer l'état que je préférois à tout autre, & vos confeils m'apprennent comment je puis m'y diftinguer. Croyez, monfieur, que vos leçons & vos bienfaits ne s'effaceront jamais de mon fouvenir. . . .

OPHÉM O N.

Je compte fur votre amitié, mon cher Renaud; & le plaifir que j'éprouverai en vous retrouvant à Paris, adoucira beaucoup le regret que j'aurai de quitter cette agréable retraite.

RENAU D.

Vous partirez fur la fin de l'automne?

OPHÉM O N.

Oui, & certainement je ne puis faire un plus grand facrifice à mon fils; car c'est pour lui feul que je me décide à renoncer aux douceurs d'une vie fi douce & fi tranquille. Sa premiere jeuneffe s'eft écoulée loin du tumulte & de la corruption; mais avec la fortune qu'il doit avoir, il est impoffible qu'il ne vive pas un jour dans le grand monde: il faut donc le lui faire connoître ; je veux du moins obferver fa conduite, lui fervir de guide dans les premiers momens de fon début, & lui choisir une femme eftimable. Je fuis vieux; fi je différois

plus long-tems, je ne pourrois plus peut-être exécuter des projets qui me font fi chers. Voilà, mon ami, les raifons qui m'empêchent de différer mon départ.

RENAU D.

Il me femble que monfieur votre fils eft affligé de cette prompte réfolution.... OPHÉM O N.

Je le crois il a les vertus & les goûts fimples qui font aimer la campagne. Mais d'ailleurs je foupçonne qu'une cause secrete contribue encore à l'attacher ici.

RENAU D.

J'ai la mème idée, je vous l'avoue ; & Collette eft fi finguliérement jolie !

O PHÉM O N.

Je fuis perfuadé qu'il en eft amoureux.

RENAUD.

...

Et je ne doute pas que le chevalier ne foit fon rival, ou ne le devienne; car il m'a paru tout-à-l'heure extrêmement frappé de la figure de cette jeune fille....

O PHÉM O N.

J'entends mon fils. Je veux abfolument m'expliquer avec lui.

RENAUD.

RENAU D.

Oui, le voici.... Je vous laiffe.... (Il fort.)

OPHÉM O N.

Verceil eft fincere ; je fuis fûr qu'il répondra fans déguisement à toutes mes questions.

SCENE II.

OPHEM ON, VER CEIL.

OPHÉM O N.

APPROCHEZ, mon fils. Je defire m'entretenir avec vous, & profiter du moment où nous fommes feuls. D'abord, dites-moi ce que vous penfez du chevalier : les bontés & l'amitié de fon refpectable oncle pour moi formerent entre ce jeune homme & vous une liaison fur la folidité de laquelle je n'ai jamais compté; & vous voyez, Verceil, que je ne me trompois pas.

VER CE I L.

,

Il eft vrai, mon pere, que le chevalier eft abfolument changé pour moi. Au lieu de cette confiance, de cette amitié qu'il me témoignoit, je ne trouve plus en lui que de la morgue, de la Tome IV. R

froideur, & un air de moquerie ou de protection qui me bleffe & me glace.

OPHÉM O N.

Le chevalier n'a point de caractere; il a peu d'efprit, & toute la puérile vanité des gens bornés. Je vous l'avois prédit, qu'il rougiroit un jour d'avoir donné le titre de fon ami intime à un homme fans naiffance. Il vous le fait fentir, il vous afflige & vous humilie peut-être. Voilà, mon fils, l'inconvénient de s'attacher aux perfonnes d'un rang au-deffus du nôtre, quand elles n'ont pas les qualités & l'efprit qui peuvent feuls nous empêcher de craindre les caprices & l'inconftance d'un méprifable & frivole orgueil.

VER CE I L.

Affurément, mon pere, grace aux principes que je vous dois, je fuis bien certain de ne jamais rougir de ma naiffance: cependant je ne pourrois fupporter le dédain, quelqu'injufte qu'en fût la caufe. Dois-je donc, pour l'éviter, m'impofer la loi de ne vivre jamais qu'avec des gens de mon état?

OPHÉM O N.

Non. Toute perfonne eftimable, qui vous

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