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On paffe trop rapidement de l'amour à la haine, de la confiance à la crainte, du trouble à la fécurité, de la fureur à la modération, & du calme à la vengeance. Les infultes font commifes & pardonnées trop légèrement; la colere s'allume & s'éteint prefqu'au même inftant. On ne trouve point ces idées neuve qui frappent l'efprit; ces réflexions fenfibles qui touchent le cœur, s'impriment dans l'ame, & que l'on retient même fans le vouloir. Le naturel eft fouvent trop naïf, & va même quelquefois jufqu'à la puérilité. Les grandes paffions, ces puiffants refforts de la Tragédie, n'y reçoivent le mouvement, que par des éclats, des em portements, des fureurs. Ici de longs entretiens, des fentiments communs, de grandes réflexions, laiffent un vuide confidérable; là une foule d'incidents fe fuccedent rapidement, & furchargent la fcene. La Grange intéreffe par les fituations; mais combien de fois fe trouvent-elles coupées par des incidents, des faillies, des jeux de mots, & des traits trop hardis qu'il falloit fupprimer! On voit briller l'efprit, où le génie feul devoit paroître. Le talent fatal de rimer facilement a produit des vers lâches, peu exacts, obfcurs, profaïques, pleins de répétitions & de mots parafites: défauts trop communs dans les vers qui ne coûtent à leur Auteur que la peine de les écrire.

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J'ai dit que ce fut à Bordeaux que la Grange Chancel, à l'âge de neuf ans, fit une Comédie. Elle rouloit fur une aventure arrivée depuis peu. Lorfqu'il l'eat finie, il prit fes mefures pour la faire jouer chez lui par cinq ou fix de fes camarades, à qui il diftribua les rôles, & qu'il exerça lui-même. Sa mere eut la complaifance de faire dreffer un petit Théatre dans une falle baffe de fa maifón. La Piece fat repréfentée plufieurs jours de congé de fuite; & cette fingularité d'un enfant de neuf ans attira tout ce qu'il y avoit de plus diftingué dans la Ville. Il n'y eut que les Héros de l'aventure qui furent très mécontents de cette

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faillie. Quoique fous des noms empruntés, ils étoient trop bien peints pour ne pas être reconnus. Ils en porterent des plaintes férieufes à la mere: le Théatre fut abattu; & la Comédie ceffa.

Quelques mois avant la représentation de Jugurtha, la Cour étant à Chantilly, on vint chercher la Grange, de la part de M. le Duc. Son guide le conduifit à un appartement, où il trouva ce Prince à table avec le Comte de Fiefque, Racine & Santeuil. Celui-ci, dont la tête étoit échauffée & par fon propre enthoufiafme, & par le vin qu'il ne s'étoit pas épargné le plaignit de profiter fi mal des talents qu'il avoit reçus; qu'un auffi beau naturel que le fien auroit dû tomber entre les mains d'un Santeuil, plutôt que dans celles de Racine; qu'il auroit fait de lui un des plus habiles hommes du fiecle pour la Poéfie Latine. Cette fougue fit rire tout le monde. La Grange crut devoir prendre la défenfe de la Poéfie Françoise & de Racine. Les Rieurs étoient pour lui. Santeuil fut offenfé de fa hardieffe, & fe mit dans une colere fi terrible, qu'il prit une affiette qu'il lui auroit jetée à la tête, fi M. le Duc ne lui avoit promptement arrêté le bras. La Grange fortit tout effrayé de la fureur & des contorfions affreufes du Poëte Victorin. Il rencontra le lendemain le Comte de Fiefque, qui lui demanda s'il étoit bien remis de fa peur? La Grange, à fon tour, le pria de lui apprendre à quel fujet fervoient des Tablettes qu'il avoit vues la veille fur la table, à côté du couvert de M. le Duc? « C'est ainsi qu'il en ufe, lui dit-il, » toutes les fois que Racine a l'honneur de manger » avec lui. Il lui échappe des traits fi agréables, que » M. le Duc fe fait un plaifir de les recueillir. Ils » ne font pas plutôt fortis de la bouche du Poëte, » qu'ils font fur les Tablettes du Prince ».

LA GRANGE, (de) d'une bonne famille de Mont

LAG

LAG pellier, reçut une excellente éducation; mais l'inquiétude & la bizarrerie de fon efprit ne lui permirent pas de fe fixer à un état. Il diffipa fes biens, & n'eut que la foible reffource de fa plume. Il donna au Théatre Italien diverfes Comédies, dont quelquesunes furent applaudies, telles que les Contre-temps, l'Italien marié à Paris, & la Gageure. Il mit auffi en vers l'Ecoffaife de M. de Voltaire. La Grange travailloit facilement; mais les malheurs qui troublerent fa vie, l'obligerent trop fouvent d'écrire à la hâte. Il mourut à l'Hôpital de la Charité à Paris, en 1767. Outre les Pieces dont nous avons parlé, il a encore donné le Déguisement, les Femmes Corfaires, l'Accommodement imprévu, la Raviffement inutile, la Fontaine de Jouvence, la Mort de Mandrin, l'Heureux déguisement, & le Palais enchanté.

On remarque dans plufieurs des Pieces de la Grange, le talent de bien conduire un fujet, & dans toutes, l'art de bien filer une fcene. Il fait amener un divertisfement & affaifonner un Vaudeville. Il n'en eft aucun de ceux qui terminent fes Comédies, qu'on ne puiffe entendre avec plaifir, & retenir avec facilité. Enfin cet Auteur a été & peut encore être utile aux différents Théatres, pour lefquels il s'eft exercé.

LA GRANGE (M. de) le Manufcrit, ou Barbacole; le Bon Tuteur, les Deux Contrats.

LA GRANGE: ( M. d'Olgiband de) Arménide, ou le Triomphe de la Conftance; Zéline, ou le Premier Navigateur; Abradate, la fleur d'Agathon, les Vignerons, la Folie du jour.

LA GUERRE, (Mde. Elifabeth-Claude Jaquet de) épouse d'un Organifte de Saint-Severin, naquit à Paris en 1669, & y mourut en 1727. Elle fe distingua de très-bonne-heure par fon goût pour la Mufique,

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& fon art à toucher du Claveffin. Elle avoit d'ailleurs du talent pour la compofition; elle a fait la Mufique de l'Opéra de Céphale & Procris.

LA HARPE: (M. de) le Comte de Warwick, Timoléon, Pharamond, Gustave Vafa, Mélanie. Il travaille à une Tragédie, dont le fujet eft tiré de l'Hiftoire des Arabes.

LA J... (M. de) Cet Auteur n'a mis que ces Lettres initiales à la tête de deux Volumes, imprimés en 1772, fous le titre de Théatre Liryque, où, après s'être fort étendu fur tous les objets qui pourroient contribuer à la perfection de l'Opéra, M. de la J... donne huit Opéra de fa façon, dont aucun n'a été mis en Mufique. Les moins foibles pour l'invention, font Antiope & Sapho.

LA LANDE, (Michel Richard de) né à Paris en 1657, Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, Surintendant de la Mufique de la Chambre & de la Chapelle du Roi, après avoir été enfant de Choeur à Saint-Germain-l'Auxerrois, fa voix ayant mué, s'appliqua aux inftruments. Dans fa jeuneffe, n'ayant pu obtenir de Lully une place de Violon à l'orcheftre de l'Opéra, il caffa fon Violon de dépit, & renonça pour toujours à cet inftrument. Il s'appliqua à l'Orgue & au Claveffin, où il réuffit, & vint à la Cour, par le moyen du Duc de Noailles, qui le donna au Roi. Il fut comblé des bienfaits de Sa Majefté, & mourut à Versailles en 1726, âgé de foixante-dix ans. Il eut pour premiere femme Anne Rebel, de la Mufique du Roi, que lui fit époufer Louis XIV: ce Prince fit les frais de la noce; pour feconde femme, la Dlle. Cury, fille du Chirurgien de Madame la Princeffe de Conti. La Lande s'est rendu fameux par fes Motets, & a compofé la Mufique de Mélicerte,

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du Ballet de l'Inconnu, & du Ballet des Eléments; qu'il a faite conjointement avec Deftouches.

L'ALLEMAND, (le Pere) Jésuite, mort vieux depuis bien des années, a compofé un grand nombre de petites Pieces d'un acte, en Vaudevilles, que les Jéfuites jouoient le foir pendant leurs vacances, fous le nom de Turelures. Le Pere l'Allemand n'a fait imprimer que l'Opéra des Moines, où l'on trouve ce Couplet fur l'air des Triolets.

Vous êtes un bon Cellerier,

Quand à la Cave il faut defcendre.
Vous ne vous faites pas prier,
Vous êtes un bon Cellerier;
Mais s'il faut fortir du Cellier,
On dit qu'il faut trop vous attendre:
Vous êtes un bon Cellerier,

Quand à la Cave il faut defcendre.

LA MAISON-NEUVE, (Jean de) né en Berry, a fait imprimer en 1559, une espece de Moralité, intirulée, Colloque focial de paix, juftice, mifèricorde & vérité, pour célébrer la réconciliation de Henri II avec le Roi d'Espagne.

LA MARRE, qu'on appelloit l'Abbé de la Marre, quoiqu'il eût quitté le petit collet cinq ou fix ans avant fa mort, eft avantageusement connu par deux Opéra, Zaïde, & Titon & l'Aurore, qui ont fait, à jufte titre, toute fa réputation. La Marre naquit en Bretagne, & ne fréquenta guere, à Paris, que les Cafés. Il obtint un Emploi à la fuite de notre Armée en Baviere, y fut attaqué d'une fievre-maligne; &, dans un transport violent, il fe jeta par la fenêtre de l'appartement qu'il occupoit, C'eft ainfi qu'il mourut en 1742, âgé d'environ trente-fix ans.

LAMBERT vivoit en 1660: voilà tout ce qu'on fait

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