Comédie en trois actes en vers, précédée d'un Prologue, 17 Août 1737. PROLOGUE.

E Prologue a pour objet la fuppreffion du titre de la Piece. Il eft en dialogue, entre Romagnefi & la Demoifelle Thomaffin, qui trouve trèsmauvais qu'on cache au Public le titre d'une Piece foumise à sa cenfure. Son Camarade foutient que l'Auteur a agi très-prudemment, & finit par ces quatre vers qu'il adreffe au Public:

Et fi d'avoir un nom l'ouvrage vaut la peine, Ce foin vous appartient, on a beau décla

mer,

Le titre eft de votre Domaine;

Et qui juge la Piece, a droit de la nom

iner.

Le Chevalier Damon, déguifé en femme de Chambre, fous le nom de Marton, ouvre la fcène, & fait connaître qu'il a été introduit fous ce dé guisement par une Brodeufe, qu'il a mife dans les intérêts de fon amour: il attend fa chere Maîtreffe pour la coeffer, & c'est-là fon premier embarras, parce qu'il n'y entend rien. La Marquife vient pour fe mettre à fa toilette; mais elle en eft empêchée par l'arrivée du Baron son Oncle, qui lui dit qu'il eft tems qu'elle renonce à l'état de veuve, & qu'elle fonge à fe remarier; elle a beau lui montrer toute fon averfion pour un fecond hymen, il perfifte dans fon deffein, & lui dit d'un ton abfolu, qu'il veut avoir des héritiers de fa façon, ou qu'il fe mariera lui-même, fi elle ne fe détermine promptement à faire choix d'un époux.

La Marquife eft fort allarmée de ce que fon Oncle vient de lui prefcrire : elle fe met à fa toilette; la fauffe fem

(1) La scène eft dans la Maison de Campagne de la Marquife.

me de Chambre s'acquitte fi mal de fon devoir, que la Marquife ne peut lui cacher fa furprife, fur fon peu d'expérience. Ninon, fa Coeffeufe, vient à fon fecours, & lui amene une nouvelle femme de Chambre, plus adroite que la premiere; c'en eft encore une de la façon de l'amour. Léandre, fous le nom de Finette, répond avec tant d'efprit aux queftions que la Marquife lui fait, qu'elle la retient fur le champ à fon service, au grand regret de Damon, qui, fans reconnaître un Rival, ne laiffe pas d'être piqué de la préférence que la Marquife donne à cette nouvelle femme de Chambre. Cette derniere commence d'entrer en fonction de Coeffeufe, & le fait avec autant d'art, que l'autre a fait voir d'embarras: nouvelle préférence de la part de la Marquife.

La Marquife étant achevée de coeffer, propofe une partie de bal à fes deux fuivantes, qui ne manquent pas d'être oppofées l'une à l'autre au fujet des traveftiffemens: la Marquife leur fait entendre, qu'elle voudrait bien qu'elles fuffent toutes deux travesties en homme; le Chevalier Damon l'accepte avec plaifir, & fe promet la préférence fous cet habit; Léandre s'en

s'em

flatte de même. La Marquife étant fortie, les deux Rivaux traveftis fe livrent à leur anthipatie fecrette, & en viennent à un éclat, qui oblige la Marquife à revenir; & à leur dire qu'elle veut abfolument que l'on vive en paix chez elle, & qu'elle congédiera celle des deux qui lui défobéira. Damon ne peut pêcher de lui laiffer entrevoir la répugnance qu'il a, à exécuter ses ordres fur ce point; elle s'en irrite, & lui défend de paraître devant elle jufqu'à nouvel ordre. Damon cede la place à Léandre, quoiqu'à fon grand regret. La Marquife eft fi charmée des manieres engageantes de la fauffe Finette, qu'elle lui ouvre fon cœur au fujet des intentions de fon Oncle. La fauffe Finette combat fon averfion pour le mariage; elle lui demande fi cette averfion n'eft pas occafionnée par quelque engagement fecret; nouvelle confidence de la part de la Marquife: elle lui confeffe qu'elle a vû dans un bal, un Cavalier deguifé en Espagnol, qui lui a paru aimable; elle ajoute pourtant qu'il n'a fait fur elle qu'une impreffion paffagere. A ce récit Léandre est charmé de fe reconnaître, & fe propofe d'en profiter: voila à peu près ce

qui fait l'action principale du premier

acte

La fauffe Finette & la Coeffeufe, par qui elle a été introduite chez la Marquife, commencent le fecond. Finette remercie l'officieufe Nifon du bonheur qu'elle lui a procuré; Nifon lui apprend que la prétendue Marton est un Rival fecret qui s'appelle Damon, & qu'elle l'a reconnu; elle l'exhorte à ne point faire d'éclat; Léandre le lui promet, & la charge d'une lettre pour la Marquife: il fe retire voyant appro cher Damon. Ce dernier qui s'eft douté que la fauffe Finette eft un homme comme lui, en fait des reproches à fon introductrice, qui d'abord nie le fait; mais qui enfin, pour lui impofer filence, lui déclare qu'elle le reconnaît pour Damon, & qu'elle révélera tout, s'il eft affez imprudent pour faire du bruit : elle fe retire voyant approcher la prétendue Finette. La converfation, entre ces deux Amans déguifés, eft d'abord affez vive; mais ils finiffent tous deux par fe promettre un fecret réciproque. Damon fe flatte de l'emporter quand il fera fous fa véritable forme; Léandre s'y attend auffi, de quelque maniere qu'il ait à com