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roit comme il le fouhaiteroit enfuite il lui conta le deffein qu'il avoit de tirer le Portrait d'une perfonne qui demeuroit à l'Abbayïe de Soyon, qu'il étoit impoffible de la peindre, ni au parloir, ni à l'Eglife, qu'il projettoit donc que fa fille fe préfentât dans cette maison pour y être Penfionnaire, fans parler de fa Profeffion, qu'il fe chargeoit de payer le voyage, la penfion, & de lui donner à lui la récompenfe qu'il exigeroit pour fa com. plaifance, & pour le fecret qu'il lui demandoit. Le Peintre étoit intereffé, & pas plus riche que ceux du même Art en ont la réputation; le gain lui fit confentir à tout ce qu'on voulut ; la fille fut reçûe dans le Couvent de Soyon; elle trouva moyen de faire le Portrait de Mademoiselle de la Charce, fi reffemblant que l'ami en fut fur

le

pris, & ne douta point que Marquis ne fentit une joie extrê. me d'avoir une pareille copie d'un original qui lui étoit fi cher; il la lui envoya le plus promptement qu'il lui fut poffible. La fille du Peintre resta six semaines dans cette Abbayïe, au bout de ce tems là elle fuppofa une Lettre qui lui apprenoit que fa mere étoit malade à l'extrémité & qu'elle demandoit à la voir avant que de mourir; elle fortit fur ce prétexte, & retourna chez fon pere, qui eut lieu d'être content des liberalitez du Confident. Le dé. part du Marquis de Crémieux redoubla l'indignation de Monfieur de la Charce, & lui fit con、 noître qu'il n'y avoit plus d'ef pérance de voir la conclufion d'une affaire, qu'il avoit beaucoup fouhaitée. Il menaça fa fille de la deshériter, il impofoit filence à Madame de la Charce,

toutes les fois qu'elle vouloit lui parler en fa faveur. Mademoiselle d'Aleyrac ne pouvoit le confoler de l'absence de fa fœur, & n'avoir pas la liberté de l'aller voir. Les chofes refterent plufieurs années en cet état, fans que Mademoiselle de la Charce mar quât le moindre repentir de ce qui s'étoit passé; il n'y avoit que l'éloignement de fa famille à quoi elle parur fenfible, ayant une tendreffe extrême pour fa mere & pour fa fœur, elle ne murmuroit point contre la rigueur de fon pere, elle auroit bien voulu pouvoir le fatisfaire, mais un afcendant qu'elle ne connoiffoit pas, l'entraîna malgré son bon naturel à un manque de foûmiffion, qu'elle blâmoit elle-même, & dont elle ne pouvoit être la maîtreffe, malgré les foins qu'elle fe donnoit, pour examiner les cauJes de fa répugnance. Les chofes

pour

refterent dans cette fituation jufqu'à une maladie, dont Mon. fieur de la Charce fut attaqué : Elle fit en peu de temps un progrès affez confiderable penfer aux affaires férieuses, on lui parla de fa fille, on lui fit entendre qu'il n'étoit pas en état de conferver aucunes animofi. tés, fur tout contre fa famille ; qu'il cauferoit une douleur éternelle à Mademoiselle de la Charce, s'il ne lui donnoit pas quelques preuves de bonté dans fes derniers momens. Monfieur de la Charce fe croyant près de fa fin, fentit diminuer fon chagrin contre fa fille; il ordonna qu'on lui menât un équipage, & qu'elle revint promptement. Si-tôt qu'elle fut arrivée, Madame de la Charce la conduisit auprès du lit de fon pere, elle fe jetta à genoux, lui demanda mille pardons, le supplia de lui

rendre fon amitié, qu'elle tâcheroit de ne s'en rendre plus indigne. Elle fondoit en laren proferant ces paroles,

tous les affiftans furent émus, le pere parut attendri.

Il lui répondit : L'état où je suis, ma fille, ne veut pas que je me fouvienne du paffé, je vous rea commande votre mere, ayez

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plus de foûmiffion pour elle que vous n'en avez eu pour moi, votre fœur vous a marqué trop de tendreffe pour qu'il foit néceffaire de vous exhorter d'y ré pondre comme vous le devez; je me flatte que vous vivrez bien avec vos freres, je vous recommande à tous l'union, c'est le principal foûtien des familles & de ne perdre pas la memoire, que je n'ai fongé qu'à vos avantages & à vous procurer des établiffemens heureux ; je fouhaite que vous profitiez des soins que

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