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niment moins difficile que celle du langage le plus aisé, comme l'italien ou l'espagnol. S'il faut 3 mois pour savoir la grammaire italienne, il ne faut pas 3 semaines pour la gamme passionnelle. Pourrait-on exiger plus de facilités dans la science qui va décider du sort de l'Humanité et de son avènement aux richesses, au bonheur?

D'ailleurs les notions élémentaires, si insipides dans une grammaire, seront souvent intéressantes dans cet ouvrage, et je puis, sur ce sujet, donner un défi au lecteur. Nous allons commencer par deux gammes, celles de la vue et des passions affectives. Je suis persuadé qu'aucun lecteur n'arrivera à la fin de la 4re gamme sans dire que plusieurs chapitres ont été amusants pour lui. En dirait-il autant de ceux d'une grammaire où tout n'est que ronces? Or, si la gamme de la vue est amusante à étudier, celle de l'amour le sera davantage. Pourrait-on exiger moins d'épines dans la science qui va nous combler de richesses et de plaisirs?

[1er rose vif piqueté; 22, cote 10.]]

CHAPITRE II.

DES PASSIONS EN ÉCHELLE PUISSANCIELLE.

Tous les enfants savent que nous avons 5 sens, la Vue, l'Ouïe, l'Odorat, le Goût et le Tact: il n'y a point de 6o sens, et ceux qui ont voulu en imaginer un se sont montrés bien maladroits. Marmontel parlant des êtres qui habitent le soleil, et voulant leur supposer quelque perfection refusée à notre chétive race, présume qu'ils pourraient avoir un sens pour entendre couler le temps; beau présent qu'il leur fait ! C'est leur attribuer la faculté la plus fâcheuse que puissent avoir les créatures; car on sait qu'elles ne sont heureuses qu'autant qu'elles ne s'aperçoivent pas de la fuite du temps. Les moments les plus tristes pour un homme ne sont-ils pas ceux où il distingue l'écoulement de chaque seconde et chaque tierce, comme il arrive à celui qui subit une opération chirurgicale, et pour qui une minute crée 60 douleurs? Cette hypothèse de Marmontel sur un 6o sens présente 3 absurdités:

4o Perfection illusoire et fondée sur un nouveau sens qui serait pour les malheureux le gage d'un supplice perpétuel ;

2o Addition d'un sens qui serait aussi superflu, aussi gênant dans l'octave passionnelle qu'un 13e son dans l'octave musicale;

3o Inconséquence de convoiter un 6e sens quand on ne sait déjà pas satisfaire les 5 existants.

Voilà sur l'idée d'un nouveau sens 3 grandes erreurs commises par un bel-esprit. Passons à celles qui ont été commises au sujet des sens connus et bornés à 5 sur tous les globes comme sur le nôtre.

Quelques observateurs ont voulu compter un 6o sens formé de la division d'un des 5 existants, qui se trouve évidemment ambigu, mais non pas double. Ils ont fait un sens à part de la faculté génératrice qui rentre dans les attributions du Tact. Si elle était admise comme 6e sens, on pourrait exciper de là pour établir pareille division sur tous les autres, et compter un 7o sens dans l'ouïe musicale, un 8o sens dans l'intuition albinose ou co-nocturne, car ce sont des facultés fort différentes de l'ouïe simple et de la vue simple. On voit des hommes trèsbien organisés de corps et d'esprit, et totalement dépourvus d'ouïe musicale; on les voit écouter des chants faux, des instruments faux, sans que leur tympan paraisse offensé, tandis qu'à leurs côtés, un homme qui a l'oreille juste et pourtant moins de bel esprit, sera lésé au point de trépigner, s'enfuir et même entrer en colère si on le force à rester. A-t il donc un sens refusé à celui qui ne s'irrite pas de cette cacophonie? Non, mais il a l'ouïe en puissance plus élevée que celui qui n'a que l'ouïe primaire au degré 1 de l'échelle, cahier souci 2o, p. 440 (4). Et de même l'Albinos qui a la vue co-nocturne comme le chat et le hibou, possède le sens de vue en degré supérieur à celui auquel s'élève la race actuelle. La première faute de nos analystes est donc de n'avoir pas admis des degrés puissanciels dans l'essor des sens comme dans celui des autres passions.

On ne peut pas dire que ces différences de degré entre l'ouïe brute et la musicale soient une diversité de goûts comme celle qui règne sur les comestibles; car un homme s'habitue peu à peu aux diverses nourritures, et, après 3 ou 4 jours de famine, il mangera avec plaisir celles qu'il répugnait le plus, même la chair humaine toute crue.

Tandis qu'aucune précaution, aucune ruse n'habituera l'homme qui a l'oreille juste à se plaire à des accords faux; si on lui propose un morceau de fausseté continue, comme un duo exécuté par des instruments discords entre eux d'un demi-ton, il aimera mieux se passer de musique toute sa vie que d'en entendre de pareille sorte.

Il existe pourtant des hommes et des nations presque entières qui tombent dans cette perclusion d'un sens en degré quelconque. Tels sont

(1) Ce tableau, auquel il est souvent renvoyé dans ce chapitre et les suivants, est contenu au grand traité, p. 394 et 395, t. Ier, A. E., et p. 356 et 357, t. III, N. E.

les Français, sans excepter la belle compagnie de Paris qui a l'oreille excessivement fausse. Les Français sont crétins physiques sur le sens de l'ouïe. En voici une preuve.

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J'assistai un jour à un bal à Paris, hôtel de Marbeuf, aux ChampsElysées, où se trouvait, sur 6 musiciens, une clarinette qui était, sinon à demi-ton au-dessus des violons, au moins à quart de ton. Je le fis remarquer à deux des commissaires du bal, et leur demandai si on ne ferait pas taire cette infernale clarinette. L'un témoignait là-dessus une profonde indifférence, l'autre disait : C'est vrai, l'instrument est faux. mais ça passe, on n'y fait pas attention. Et pourtant ce bal ne contenait que la haute compagnie, la crême des incroyables. Si l'on avait donné pareil orchestre à des savetiers d'Italie, ils auraient hué et fait sortir le coupable. Il y a donc des nations entières qui sont lésées et comme estropiées sur l'un des sens. Le Français est de ce nombre. Aussi les acteurs sur tous les théâtres de France ont-ils plein pouvoir de fausser et manquer la mesure. Même abus a lieu dans les musiques de régiment; on y entend 2 et 3 instruments en faux accord sans que personne s'en émeuve, sans que les musiciens ni le corps des officiers qui paie la musique aient l'air de s'en apercevoir. D'autre part le peuple, en France, écoute avidement des chanteurs si faux sur la mesure et le son, qu'un homme qui a de l'oreillé est obligé de fuir. Ces bourreaux auriculaires font les délices de la nation française. Elle est en musique ce que sont, en gastronomie, les Corbeaux qui ne vivent que de viandes corrompues. Ne disputons pas des goûts, mais convenons qu'il existe des degrés dans les facultés sensuelles, et que dans l'analyse des sens on doit, en principe, admettre une échelle de facultés. Si l'on prétend après cela que je ne sache pas déterminer les degrés ou puissances de l'échelle, d'autres feront mieux. Mais avant tout, posons le principe; sans quoi il deviendrait impossible de procéder à l'analyse des sens et aux calculs des harmonies sensuelles et animiques.

Distinguons soigneusement l'échelle de facultés puissancielles de l'é · chelle de nuances. Nos savants et artistes, qui ne s'occupent qu'à perfectionner nos sensations, admettent donc une série de nuances plus ou moins parfaites dans l'essor des sens, une échelle de raffinement et de grossièreté dans l'exercice de chaque faculté; mais, tout occupés de ces échelles de nuances, ils ne songent point aux échelles de facultés ou puissances qu'on n'a jamais établies ni cherché à discerner. Tel Albinos aura la vue plus perçante dans la nuit que tel autre Albinos. Il y aura entre eux degré de nuance visuelle; mais de leurs yeux aux nôtres il y aura degré de puissance visuelle et nouvel échelon de facultés, car la vue albinos ou co-nocturne est fort différente de la vue ordinaire. C'est un échelon distinct en série visuelle; il en est de même de la

vue télescopique, fort différente de la vue naturelle. Voilà déjà une série de 3 échelons puissanciels sur la vue, n'en existe-t-il pas d'autres, et cette échelle puissancielle n'est-elle pas applicable à tous les sens? Je traiterai cette question amplement dans la 2e notice. En attendant, observons qu'il n'existe aucune théorie sur l'analyse des sens, tant qu'on n'y distingue pas des échelles de nuances et des échelles de puissances. Comment, sans ces dernières, expliquer les lacunes sensuelles, comme l'onïe musicale et autres, qui s'étendent souvent à des nations entières, témoin en France, où le vice de fausse-oreille est endémique?

Ces lésions sensuelles doivent être considérées comme insuffisance et non privation d'un sens; l'ouïe musicale n'est pas un sens distinct, mais une modification de l'ouïe. Si l'on admet que la jouissance amoureuse forme un sens séparé, il faudra admettre même distinction au sujet de l'ouïe musicale, et nous aurons bientôt 40 sens, et même 15 ou 20 au lieu de 5. N'est-il pas plus régulier d'admettre des degrés puissanciels dans les sens avec une exception en faveur du 5o sens, Tact-rut qui, parmi ses degrés puissanciels, en donne un temporaire et assez distinct pour former ambiguité? Les autres sens n'ont rien de temporaire dans leurs puissances; la vue albinose, la vue télescopique existent pour l'enfant de 5 ans comme pour l'homme de 20 ans.

((II est sur les propriétés des sens, divers classements à établir, savoir : 4. La division en 2 actifs, 2 passifs et 4 neutre.

2.

Id. en 3 simples et 2 composés.

3. L'ambiguité du 5o sens.

4. L'essor puissanciel des sens.))

En vain la morale veut-elle ravaler les sens, il en est parmi les 5 deux qui suffisent à eux seuls pour confondre et asservir tous leurs détracteurs ce sont la Gourmandise et la lubricité. L'une est nourricière du monde, l'autre en est reproductrice; et d'ordinaire, ceux qui déclament contre ces 2 sens, en sont les plus humbles esclaves. Ils aspirent donc à jouir de l'ordre de choses où le plein développement des sens nous sera garanti et pourra s'exercer en parfait équilibre, en plein accord avec le maintien de la santé et de la fortune.

On trouve dans le parallèle du sauvage et de l'animal une preuve incontestable que nous n'avons aucune notion sur l'équilibre des sens. Le sauvage est, dit-on, l'homme de la nature; mais l'animal aussi est dirigé par la seule nature, cependant il n'abuse pas des plaisirs sensuels dont le sauvage fait excès toutes les fois qu'il en a l'occasion. Si on lui donne des liqueurs fortes, à discrétion, il s'en gorgera jusqu'à tomber mort-ivre, ou commettre des meurtres. Le civilisé n'est pas moins dépravé dans l'abus des sens. Ni l'un ni l'autre ne sont donc à l'état d'é

quilibre où arrive l'animal parce qu'il est parvenu à sa destination, qui est simple, tandis que l'homme n'est point à la sienne tant que ses passions ne sont pas développées et équilibrées par séries contrastées. Hors de ce mécanisme il n'est point d'Harmonie passionnelle chez l'homme; on n'y voit qu'état brute chez le sauvage et subversif chez le civilisé; mais nullement cette nature équilibrée qu'on trouve déjà dans l'animal parce qu'il est de nature simple, arrivant au but par le seul ressort de l'instinct. L'homme étant de nature composée ne peut atteindre au but que par le secours du génie combiné avec l'instinct; il doit s'élever à la destination composée, en ajoutant aux impulsions de l'instinct les impulsions artificielles de la série contrastée, hors de laquelle il n'est aucun moyen d'équilibrer les passions. C'est une vérité assez démontrée par l'aspect du sauvage qui est étranger à l'équilibre passionnel, quoique vivant sous les lois de la nature simple ou instinctuelle qui ne peut suffire à guider un être de nature composée.

Hors de cet état composé, qui n'existe que par les séries passionnelles, nous sommes abusés par toutes nos passions sensuelles ou animiques, abusés par l'Honneur et l'Amitié, comme par la Gourmandise et la lubricité. La nature semble en conspiration permanente contre l'homme civilisé pour l'entraîner sans cesse au mal; tout n'est que piège pour lui dans les impulsions de nature simple, et les moralistes, en voulant y ajouter un levier d'équilibre nommé raison, ne font preuve que de déraison et d'ignorance, puisqu'ils n'obtiennent que des résultats contraires à leurs vues. Ces efforts confus de la science pour atteindre à un équilidre passionnel, prouvent seulement que l'homme est destiné à découvrir une boussole en ce genre d'opération, et que la nature le stimule à la chercher. Elle est enfin trouvée, et pour nous acheminer à l'étude de ce procédé, nommé série passionnelle, qui est le seul garant d'équilibre, commençons par une étude exacte des 12 ressorts primordiaux par lesquels opère une série. N'écoutons sur ces 12 passions, et notamment sur celles des sens, aucune des diatribes philosophiques; analysons leurs propriétés, bonnes ou mauvaises, en pleine échelle, en octave de 8 degrés comme la gamme musicale, d'où nous déduirons les règles de leurs équilibres et de leurs accords dans les séries passionnelles, et les moyens d'arriver au bonheur dans un mécanisme social où les impulsions des sens et de l'âme deviendront pour nous autant de guides fidèles, à qui nous pourrons aveuglément nous confie.

J'ai démontré qu'il existe dans les facultés de nos sens des degrés ou puissances; que tel sens, comme l'ouïe, peut se développer en 4re puissance chez l'un, en 2o ou 3o chez l'autre, sans que pour cela il existe 2 et 3 sens d'ouïe. Je devais d'abord cette réponse aux beaux-esprits

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