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inftant. Une fortune conftante nous met au-deffus des maux, mais lorsque ce font les crimes qui nous l'ont préparé, elle s'ervole plus légere que le vent La bienséance ne me permet pas de parler des indignités que tu as faites à des femmes. Je me contente de dire que maître de ce palais, & fier de ta beauté, tu pouffois l'infolence à fon comble. Pour moi je ne veux point d'époux dont le vifage reflemble à celui d'unė jeune fille. Je veux un homme courageux & vertueux. Les enfans de ce dernier peuvent foutenir toutes les rigueurs de Mars; les enfans du premier ne font au contraire bons que pour les chœurs & les danfes. Périffent les fcélérats de la même maniere dort tu es péri! Quoique la fortune ait d'abord été favorable, qu'on ne s'imagine pas être parfaitement heureux, qu'on n'ait atteint le bout de la carriere.

LE CHŒUR.

Les crimes d'Egyfthe font grands; la peine eff proportionnée à leur énormité. La juftice ne perd jamais les droits.

ORESTE.

Qu'on emporte ce cadavre, & qu'on le cache de crainte que votre mere en venant ici ne l'apperçoive.

ELECTRE.

Ceffons ce difcours.

ORESTE

Quelles font ces perfonnes qui s'avancent de ce

côté ci? Ne viendroient-elles point pour venger la mort d'Egyfthe?

ELECTR E.

C'eft Clytemneftre.

ORESTE.

Elle vient d'elle-même fe jetter au milieu du

péril.

ELECTRE.

Voyez-vous ces habits fuperbes ? Voyez-vous ce char magnifique fur lequel elle eft montée ?

ORESTE.

Qu'allons-nous faire? Tremperons-nous nos mains dans le fang de notre mere?

ELECTRE.

Eft-ce donc fa vue qui excite votre pitié ?

ORESTE.

Comment égorger celle dont j'ai reçû le jour dont mon enfance a éprouvé les tendres foins

ELECTR E.

Comme elle a égorgé votre pere & le mien,

ORESTE.

Apollon, que tes oracles font injuftes)

ELECTRE.

Qui fera donc jufte, fi Apollon ne l'eft pas ?

ORESTE.

Tu m'ordonnes de tuer une mere, & la nature me le défend.

ELECTR E.

Eft-ce un crime de venger un pere?

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Ceffez-vous d'être vertueux en vengeant Aga memnon?

ORESTE.

Je ferai puni de l'avoir fait aux dépens du fang de Clytemnestre.

ELECTRE.

A qui laifferez-vous donc le foin de venger le Roi?

ORESTE.

Ah! fi c'étoit un mauvais démon qui m'eût trompé fous la forme d'un Dieu !

* Orefte à la vue de fa mere éprouve des remorda comme Cinna dans Corneille.

On ne les fent auffi que quand le coup approche,
Et l'on ne reconnoît de femblables forfaits

Que quand la main s'apprête à venir aux effets.

ELECTRE.

Ne le croyez pas : le facré trépié ne rend des oracles furs.,

ORESTE.

Non, je ne puis juftifier cet oracle.

ELECTRE.

que

Souffrirez-vous qu'on puiffe vous reprocher d'avoir manqué de cœur ?

ORESTE.

Eh bien: il faut donc se réfoudre...

ELECTR E.

'A la faire tomber dans le même piége qu'Egyfthe.

ORESTE.

Entrons je vais commettre un attentat horrible, un crime exécrable à toute la nature. Mais les Dieux l'ont ainfi voulu. Le fort en eft jetté. O moment trop doux pour un pere à venger, & tropcruel pour un fils qui le venge!

SCENE

SCENE I V.

CLYTEMNESTRE, ELECTRE, LE CHOUR.

J

LE CHŒUR.

E vous falue, illuftre Reine d'Argos, fille de Tyndare, fœur de Caftor & de Pollux qui habitent le Ciel, & que les matelots invo quent dans les dangers. Heureuse comme le Dieux, je vous refpecte comme eux. Songez feulement à conferver votre bonheur.

CLYTEMNESTRE.

Descendez de votre char, Troyennes, foutetenez-moi dans vos bras. Les riches dépouilles enlevées aux Phrygiens, & ces Efclaves me dédommagent foiblement de la fille que je n'ai plus.

ELECTR E.

Je fuis, comme elles, une efclave bannie de la maison de mon pere; fouffrez, Madame, que je vous préfente la main, & que je faffe leur fonction.

CLYTEMNESTRE.

Je ne le permettrai point: c'est le devoir de ces Efclaves.

* Iphigenie.

F

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